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La Ritaline limitée en Suisse et en france

La Ritaline limitée en Suisse et en france

par Emeric Lorentz, jeudi 12 mai 2011, 10:10
 

La Ritaline limitée en Suisse

12 mai 2011 | No Comments »

Nous pouvons voir que la Suisse se pose les bonnes questions quant à la Ritaline. Serions-nous les plus forts et les plus intelligents du monde pour continuer en France à refuser de voir l’inévitable ou cet aveuglement aurait un rapport direct avec les liens intrinsèques que nos politiques entretiennent avec les fabricants pharmaceutiques ?

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En mars 2011, nous apprenions que l’OFSP (Office fédéral de la santé publique) suisse veut limiter la prescription de la Ritaline, médicament utilisé pour traiter des enfants souffrant du trouble du déficit de l’attention et d’hyperactivité (TDAH). Poussé par des interventions parlementaires, l’Office fédéral s’inquiète de l’usage abusif croissant de cette substance, sous le prétexte qu’il permet d’être plus concentré pendant un examen. Selon le quotidien suisse Tages-Anzeiger, des enquêtes ont montré que les étudiants consomment de plus en plus de psychostimulants contenant du méthylphénidate tels que la Ritaline®. Swissmedic (Institut suisse des produits thérapeutiques) doit procéder à une réévaluation de ces substances qui peuvent être actuellement prescrites par n’importe quel médecin.

En France, la Ritaline ne fait pas partie des médicaments sous surveillance spéciale, elle est même considérée comme un médicament incontournable. Ce psychostimulant amphétaminique est ordonnée dans les cas de troubles déficitaires de l’attention, l’incapacité à se concentrer, l’instabilité émotionnelle, l’impulsivité, l’hyperactivité modérée ou sévère. Cependant, certains enfants de moins de six ans sont ainsi traités, bien que le traitement initial soit soumis à une prescription hospitalière annuelle des services de neurologie, psychiatrie et pédiatrie, mais elle peut être renouvelée par tout médecin sur présentation de la prescription initiale. Dès 1997, les laboratoires Novartis avaient vendu 28 127 boîtes dans notre pays. En 2004, les ventes s’étaient multipliées par six. Aujourd’hui, plus de 10 000 enfants consomment ce poison afin d’améliorer leur concentration et leur docilité, et de calmer leur impulsivité. Il faut savoir que la Ritaline est une amphétamine dont les effets sont comparables à ceux de la cocaïne.Cette drogue sur ordonnance est tellement dangereuse que l’armée américaine refuse d’enrôler les jeunes qui ont été traités par ce médicament avant l’âge de douze ans.

Le Vidal signale la nervosité et l’insomnie parmi les effets indésirables fréquents, ainsi qu’une diminution de l’appétit. Lors des traitements prolongés, on remarque également un ralentissement de la prise de poids, parfois un léger retard de croissance. Ces effets peuvent paraître négligeables, mais le Vidal indique aussi que « les données disponibles ne permettent pas d’extrapoler le risque hépatique carcinogène observé avec le méthylphénidate chez l’animal à l’homme, sans toutefois l’exclure formellement. » En effet, ce poison provoque des tumeurs cancéreuses du foie chez les souris de laboratoire. Si la Société Novartis était parfaitement convaincue de l’innocuité de son produit, elle n’emploierait certainement pas des formules telles que « pourrait causer » ou « il n’existe aucune évidence » ou bien « on ne connaît pas exactement son action sur l’homme ». Et si l’on ignore cette action sur l’adulte, il est certain qu’on l’ignore encore davantage chez l’enfant, surtout à long terme. De même, « son potentiel tératogène n’a pas été clairement établi ». En outre, puisque cette drogue légale est une amphétamine, elle correspond à la définition des drogues illégales et génère évidemment une accoutumance, forme de toxicomanie infantile.

En résumé, le fabricant avoue clairement que ses chercheurs n’ont pas poussé les investigations assez loin pour garantir la sécurité d’emploi du produit ni même son efficacité. Il ignore exactement son action sur l’homme, son risque hépatique carcinogène et son potentiel tératogène. En vérité, il sait bien peu de choses sur un produit dont il a demandé et obtenu l’autorisation de mise sur le marché. Et si le laboratoire fabricant n’a pas poussé ses travaux assez loin, qui le fera ? Qui peut garantir mieux que lui qu’il n’y aura pas d’effets secondaires graves ? Toutefois, il est aussi possible que ces travaux aient été faits, mais que le laboratoire préfère ne pas ébruiter les résultats. Aussi, comment certains médecins osent-ils affirmer que la Ritaline® est un « médicament très sûr » ?

Le plus incroyable est que personne n’est en mesure de démontrer que ce genre de médicaments améliore le rendement scolaire des enfants ainsi traités. Le seul effet « bénéfique » est de permettre une gestion à court terme de l’hyperactivité et de faciliter la vie des parents et des enseignants plutôt que celle des enfants qui risquent, un jour, de payer très cher l’inconscience de certaines familles et des médecins. Dans son ouvrage Les Inventeurs de maladies, manoeuvres et manipulations de l’industrie pharmaceutique, Jörg Blech l’appelle la « pilule d’obéissance ». Le traitement chimique est une arme à double tranchant. Il peut, en effet, permettre à ces enfants hyperactifs de s’intégrer aux normes en cours et de rassurer ainsi les parents, et d’autre part, comme toutes les drogues de ce genre, il génère une certaine euphorie qui permet aux consommateurs d’oublier leur différence et leurs complexes par rapport aux autres. Cependant, en parallèle à ces avantages théoriques, il détruit la personnalité, la spontanéité de ces enfants et, sans aucun doute, leur santé physique. De toute manière, en dépit des affirmations des scientistes sûrs de leur savoir, il n’existe aucun critère pour confirmer que l’ADHD (Attention Deficit Hyperactivity Disorder) est bien une maladie. Il n’existe pas davantage d’évidence scientifique prouvant qu’un déséquilibre du cerveau est responsable des symptômes attribués à l’ADHD. C’est pourtant ce que de nombreux psychiatres répètent afin d’imposer un traitement à la Ritaline.

Depuis près de vingt ans, un important changement est intervenu en psychiatrie, avec l’arrivée massive des médicaments dans la prise en charge de troubles mentaux. Il n’y a presque plus de camisoles de force, elles ont été remplacées par des camisoles chimiques. La plupart des pays « développés » ont connu des augmentations alarmantes de cette consommation, excepté le Royaume-Uni, où les instances de santé ont constaté l’inefficacité de cette drogue chez les moins de 18 ans et l’augmentation par deux du nombre de suicides. Ce pays a donc pris, en 2003, la décision d’interdire ce type de médicaments en dessous de cette tranche d’âge. Le 22 septembre 2005, l’Inserm publiait un rapport sur les troubles de conduite chez l’enfant et l’adolescent qui pourraient plus tard mener à la délinquance. Les experts recommandent de dépister les troubles du comportement de manière systématique dès l’âge de 36 mois, et proposent de former les enseignants afin d’augmenter l’efficacité de la procédure. Cette expertise de plus de 400 pages a été commandée par la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs indépendants dans le dessein « d’améliorer le dépistage, la prévention et la prise en charge » des futurs délinquants, révoltés contre « les normes sociales ». Tributaire de la politique sécuritaire, elle se réfère aux données de la littérature scientifique internationale, et nous explique comment traiter ces troubles, parfois avec des médicaments. Le lobby pharmaceutique avait déjà médicalisé presque toutes les périodes et les événements de la vie, il a enfin pu médicaliser la délinquance dans le cadre si cher à nos élus : la prévention.

Cette étude de l’Inserm est du pain béni pour le fabricant de la Ritaline. Elle préconise « le repérage des perturbations du comportement dès la crèche et l’école maternelle ». Pour les experts, les colères et les actes de désobéissance dès les trois premières années de la vie sont pathologiques et « prédictifs » de la délinquance, ainsi que quelques traits de caractères, comme l’indocilité, l’impulsivité, l’intolérance aux frustrations, et même la « non maîtrise de notre langue ». Ainsi, cette « caution scientifique » peut instrumentaliser des pratiques de soins relevant de la pédopsychiatrie à des fins de sécurité et d’ordre public. La détection systématique des enfants « agités » dans les crèches et les écoles maternelles risque de transformer ces établissements à vocation d’accueil et d’éducation en gares de triage pour « futur délinquants ». Ces experts ignorent-ils que quantité de savants et d’illustres penseurs furent de mauvais élèves, désobéissants, révoltés, refusant d’entrer dans le moule que l’on voulait leur imposer. Einstein en fut un parfait exemple. Nombre de médecins, pédiatres, pédopsychiatres, neuropsychiatres, anthropologues et sociologues ont été révoltés par cette expertise. À leurs yeux, en médicalisant à l’extrême des phénomènes d’ordre éducatif, psychologique et social, en stigmatisant toute manifestation vive d’opposition inhérente au développement psychique de l’enfant, en isolant les symptômes de leur signification dans le parcours de chacun, l’expertise de l’Inserm entretient la confusion entre malaise social et souffrance psychique, nie l’abord du développement singulier de l’être humain et « robotise » la pensée soignante.

Le pédopsychiatre Marcel Rufo s’est violemment insurgé contre cette expertise : « Soyons Astérix. Soyons les derniers résistants en France pour une médecine du sujet et non de l’organe, pour une médecine de la structure psychique et non du symptôme. » D’après une expertise faite en 2003 par l’Inserm sans enquête épidémiologique, un enfant sur 8 souffrirait de trouble mental et 5,9 % des jeunes de 15 ans seraient atteints de « troubles de conduite ». Laurent Mucchielli, directeur du centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, commente cette expertise : « Et à côté des propositions de mieux former les professionnels, on découvre des demandes de financement pour des recherches pharmacologiques ! ». Il déplore que cette expertise ignore totalement tout ce qui concerne les facteurs sociaux, les facteurs de groupe. « Il ne sert à rien de donner des moyens à des labos en pharmacie ou à la recherche sur les souris, alors qu’on a besoin de psys, d’aides-soignants, d’éducateurs, de tous ces gens qui travaillent autour de l’enfant. Ce rapport traduit donc surtout l’influence du lobby des biologistes, qui est très fort, au détriment des aspects sociaux. » Il est permis de rapprocher cette attitude de ce qui se passe déjà aux États-Unis.

Aux États-Unis, le département de l’éducation et l’Institut national pour la santé mentale (NIMH) pousse à l’utilisation de la Ritaline avec autant de vigueur que le producteur du médicament, souvent en usant de termes encore plus enthousiastes que ceux que Novartis peut se permettre sans tomber dans l’illégalité. Ainsi, dans l’Illinois, les services de Santé ont décidé de prendre en main la santé mentale des enfants de l’État, de la naissance à 18 ans, sans admettre aucune exemption. Ce projet est partagé par de nombreux autres États, mais l’Illinois est le premier à l’avoir mis en place, et Patti Bellock, député et membre actif d’un groupe d’intervention, n’hésitera pas à avoir recours à cette brigade spéciale, la Task Force. Patti Bellock s’est lancée dans ce processus parce que des études montrent qu’un enfant sur six souffre de dépression, et que la dépression « affecte la capacité d’un enfant à apprendre et accroît sa propension à la violence, l’alcool et génère d’autres comportements délinquants ». L’évaluation de la santé mentale sera donc ajoutée sur les certificats d’examens de santé et tous les enfants de l’Illinois, excepté ceux qui auront une exemption religieuse, devront être à jour de leurs bilans de santé et de leurs vaccinations pour entrer en classe. Les femmes enceintes seront examinées et surveillées pendant un an après la naissance du bébé. Ce seul examen obligatoire va coûter quelque 10 millions de dollars. « Si quelqu’un pense échapper à cela, parce que son enfant n’est pas dans une école publique, il se trompe », a déclaré Paul Schneider après les auditions. Il s’est violemment insurgé contre ce projet : « Si la famille refuse d’accepter l’évaluation de la santé mentale par l’école, quel recours aura-t-elle ? Qui va payer et qui va déterminer qui est sain ou non mentalement ? ». Il pense à juste titre que les compagnies pharmaceutiques vont fortement bénéficier de l’explosion d’enfants considérés comme hyperactifs auxquels on ordonnera de la Ritaline. Pour sa part, Karen Hayes, Co-Directrice de l’Association Concerned Women for America-Illinois, a déclaré aux membres du groupe d’intervention : « Ce n’est pas un bénéfice pour les enfants, ni pour les contribuables de demander à la bureaucratie gouvernementale de décider des standards de la santé mentale. Puis-je proposer que la santé mentale des auteurs de ce concept soit évaluée ? » Karen Hayes est très choquée qu’une loi aussi importante ait été votée en catimini.

Il faut avouer que ce procédé ressemble étrangement à tout ce que nous avons pu lire dans des livres de science-fiction tels Nous autres d’Eugène Zamiatine, Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley, ou 1984 de George Orwell. Il est fâcheux que la France, qui se prétend un pays de liberté et le meilleur défenseur des Droits de l’Homme — bien que personne ne le croie plus —, cherche à imiter un pays qui lui aussi fut un défenseur de la Liberté, mais dans lequel cette liberté se réduit chaque jour comme une peau de chagrin. Notre société a institutionnalisé l’abus de médicaments parmi nos enfants. Pire encore, nous maltraitons nos enfants avec des médicaments au lieu de faire un effort pour mieux répondre à leurs besoins. Sur le long terme, nous donnons une très mauvaise leçon à nos enfants en les habituant à ce que les médicaments soient la réponse à leurs problèmes émotionnels.

Aussi, au lieu de mettre ces enfants sous haute surveillance, il serait préférable que notre société se pose les bonnes questions : Les normes que nous leur imposons sont-elles compatibles avec la vie actuelle ? sont-elles valables dans notre société qui va à vau-l’eau ? Notre civilisation moderne est-elle un bon exemple de bonheur sur notre planète bien malade ? Et l’avenir que nous leur préparons est-il un signe d’évolution de notre société et de notre conscience ou bien une preuve flagrante de notre déchéance ?



12/05/2011
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