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Nouvelle donne pour la protection de l’enfance

 

Nouvelle donne pour la protection de l’enfance

Inéluctable, ravivée par de récents et retentissants procès, une profonde réforme de la protection de l’enfance est à l’ordre du jour. Présentée ces jours-ci en Conseil des ministres avant de l’être au Parlement, elle pourrait voir le jour dans les prochains mois. Des « premières assises de la protection de l’enfance » ont officialisé le rôle pivot des conseils généraux dans le nouveau dispositif

Une manifestation hautement symbolique : les 10 et 11 avril 2006, les premières assises nationales de la protection de l’enfance ont déroulé la trame d’une nouvelle toile de fond, à Angers, lieu de la plus importante affaire de pédophilie jamais révélée en France. Souvenons-nous : le président de son conseil général avait été convoqué par la cour d’assises pour s’y expliquer sur le fonctionnement des services sociaux.
Gros succès pour ces premières assises : 1300 participants, pour la plupart cadres d’action sociale, issus de quatre-vingt-cinq départements. Avec un peu de justice et d’associatif, un zeste d’éducation nationale… Le ministre délégué à la Famille, Philippe Bas, y a redessiné la réforme en cours et la probable future rapporteure du projet, la députée Valérie Pécresse, est venue y recueillir d’ultimes remarques…
Le 16 mars 2006, le ministre avait déjà rendu publics les trois axes de sa réforme : renforcement de la prévention, organisation du signalement, diversification des modes de prise en charge. Sur le premier point, un travail en amont est envisagé : entretien dès le 4ème mois de la grossesse, lien systématique avec les services de protection maternelle et infantile (PMI), bilan pour les enfants de maternelle et à l’entrée en primaire, développement des actions de soutien à la parentalité. Il est prévu d’embaucher — enfin — sur trois ans quelque 4000 nouveaux professionnels, essentiellement dans le domaine de la protection maternelle et infantile, la médecine scolaire et l’intervention sanitaire et sociale au sein des familles. Le second item introduit dans la loi la délicate notion de partage d’informations entre professionnels, tout en réaffirmant l’importance du secret professionnel. De nombreux débats avaient rappelé en amont les enjeux, voire les effets pervers d’une information qui serait maladroitement partagée. Au final, une « cellule départementale d’écoute et d’appréciation des situations » devra favoriser des décisions plus collégiales. Quoi qu’il en soit, l’aide sociale à l’enfance (ASE) sera investie d’un rôle d’intervention prééminent, la justice n’étant saisie qu’en cas de danger manifeste ou d’opposition réaffirmée des parents.

Le monde associatif ne peut rester à la marge d’un changement de cette ampleur

Enfin, les modes de prise en charge seront résolument diversifiés : aide éducative à domicile, AEMO « modulée », accueil de jour, accueil alterné ou séquentiel, accueils d’urgence limités à 72 heures pour les adolescents, etc. Des « carnets de parcours » centraliseront les différentes étapes d’une prise en charge. Les guides de bonnes pratiques vont se multiplier : autour de l’évaluation d’une situation, du signalement, des modalités et du contenu des interventions, du recueil des informations, mais aussi des visites médiatisées… Maître de cérémonies de ces assises avec le conseil général du département, l’Observatoire national de l’action sociale décentralisée (ODAS) présente une enquête : les neuf dixièmes des départements sont favorables à la cellule unique de signalement, représentant le principal outil concret d’évaluation partagée. De même, l’idée d’une PMI étendue de 0 à 11 ans fait son chemin, ainsi que celle d’un travail social moins administratif, par exemple un service social polyvalent « plus impliqué, avec davantage de visites à domicile et de travail dans les quartiers »…
Le modèle québécois est fréquemment évoqué. « Il nous faut penser québécois », suggèrera même Jean-Louis Sanchez, délégué général de l’Odas, estimant que « le travail social est dans une formidable impasse administrative ». Le concept de « prévenance » est avancé pour se substituer aux pratiques actuelles.
Pourtant, il s’agit bien de renforcer aussi l’existant : l’insuffisance de moyens en pédopsychiatrie est devenue un véritable problème de santé publique, les technicien(ne)s de l’intervention sociale et familiale (TISF, au nombre de 5000) et les puéricultrices (environ 13 000) sont en nombre insuffisant, la médecine scolaire est lacunaire et nombre d’autres secteurs restent découverts, malgré la récente annonce ministérielle.
Globalement, cette urgence nationale ne concerne pas l’ensemble des enfants, a relativisé le délégué interministériel à la Famille, Dominique de Legge : actuellement, 350 000 enfants sont protégés, dont 270 000 enfants pris en charge par la seule ASE (les autres l’étant par la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), sur un total de seize millions de jeunes de 0-20 ans : soit 2, 5 %.
En tout cas, le monde associatif ne peut rester à la marge d’un changement de cette ampleur : née il y a quelques semaines, la coordination nationale des associations de protection de l’enfance (CNAPE), regroupant huit fédérations ou associations, a largement contribué au débat 1 . Comme d’ailleurs le conseil supérieur du travail social (CSTS), qui avait lui aussi efficacement accompagné la réflexion…

Joël Plantet

1Secrétariat de la coordination - UNASEA - 118 rue du Château des Rentiers - 75013 Paris. Tél. 01 45 83 50 60



18/02/2011
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