Pour ses avocats, elle doit sortir. Mais parce que l’affaire n’est « pas encore élucidée », le parquet général a réclamé, ce mardi, le maintien en détention de la mère de Fiona avant son procès en appel pour la mort de sa fille, en 2013 à Clermont-Ferrand.
La chambre de l’instruction de la cour d’appel du Puy-de-Dôme rendra sa décision mercredi à 11h.
« Je ne sais pas, si demain Madame [Cécile] Bourgeon est libre, ce qu’elle fera. Je n’ai pas envie qu’on vienne souiller une nouvelle fois la scène de crime. La mise en liberté peut porter atteinte à une recherche éventuelle » du corps de Fiona qui n’a jamais été retrouvé, a estimé l’avocat général, Raphaël Sanesi de Gentile.
5 ans de prison
Le magistrat, qui dit se détacher du « qu’en dira-t-on et de l’opinion publique », craint également pour la sécurité de la jeune femme dont l’acquittement partiel a suscité des manifestations d’indignation populaire au sortir de la cour d’assises à Riom.
Le 26 novembre, Cécile Bourgeon a été acquittée du chef de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner sur sa fille de cinq ans, tandis que son ancien compagnon, Berkane Makhlouf, était condamné à 20 ans de réclusion pour ces mêmes faits.
La cour avait condamné la mère à cinq ans de prison pour quatre délits, notamment « non-assistance à personne en danger » et « dénonciation de crime imaginaire » pour avoir monté le scénario de sa disparition dans un parc de Clermont-Ferrand, le 12 mai 2013.
Craintes pour sa sécurité
Expliquant avoir reçu des « messages d’insatisfaction » depuis, l’avocat général, qui avait requis 30 ans de réclusion pour les deux accusés, redoute du « harcèlement, une éventuelle agression ».
« Va-t-elle s’enfermer, fermer les volets, se cloîtrer pour se protéger? » Ne pas la libérer est « dans l’intérêt de tous et celui de Cécile Bourgeon », a conclu le représentant du parquet général, qui avait fait appel du verdict.
Les avocats de la mère de Fiona, qui a assisté à l’audience de mardi en visio-conférence depuis la maison d’arrêt de Lyon-Corbas où elle est détenue depuis septembre 2013, estiment au contraire que leur cliente doit sortir de prison.
« Si le parquet n’avait pas relevé appel de l’arrêt de la cour d’assises, Cécile Bourgeon serait aujourd’hui dehors! », a dit Me Renaud Portejoie.
« Aveu de faiblesse »
Dans un tel cas, elle serait en effet libérable au 23 janvier après 40 mois passés sous les verrous, soit les deux-tiers de la peine de cinq ans d’emprisonnement prononcée en novembre. Mais du fait de l’appel, elle se retrouve « dans la situation antérieure au procès », c’est-à-dire en détention provisoire.
La maintenir en prison, d’ici l’audience d’appel, pour des raisons de protection? C’est « un aveu de faiblesse et d’impuissance de l’institution judiciaire », a renchéri Me Renaud Portejoie car, au vu de la décision de la cour d’assises et de son jury populaire, « c’est le souhait du peuple français que Cécile Bourgeon retrouve sa liberté fin janvier 2017 ».
Devant la presse, le père de Fiona, Nicolas Chafoulais, a pour sa part prévenu de sa « colère » si la justice décidait de libérer son ancienne compagne. « Cinq ans pour avoir tué sa fille, c’est quand même léger. Sa place est en prison, ce n’est pas dehors », a-t-il dit.
Nouveau procès
Il craint par ailleurs que son ancienne compagne décide de revoir sa deuxième fille dont il a la charge, alors que la justice l’a déchue de son autorité parentale.
Cécile Bourgeon et Berkane Makhlouf, dont le procès n’a pas permis de faire la lumière sur la mort de Fiona, seront rejugés dans une autre juridiction, qui n’a pas encore été désignée, à une date qui reste à fixer.
Dans l’affaire dite de la « veuve noire » de l’Isère, Manuela Gonzalez, condamnée en première instance, en avril 2014, à 30 ans de réclusion criminelle pour meurtre, avait été remise en liberté par la cour d’appel de Grenoble, en septembre 2015, au motif que le délai pour la rejuger était trop long. Elle était alors en détention provisoire depuis plus de cinq ans. Elle a depuis été condamnée en appel à la même peine.