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L'ABUS DE CONFIANCE
L'abus de confiance est une forme d'appropriation frauduleuse du bien d'autrui par détournement. C'est une infraction qui est traditionnellement décrite comme un moyen de protection de la propriété et de la bonne foi contractuelle, la fonction de protection de la confiance étant devenue la fonction principale de l'abus de confiance.
L'abus de confiance est défini par l'article 314-1 du Code pénal comme le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé.
Dans l'abus de confiance l'auteur de l'infraction s'approprie un objet qui lui a été remis sans employer de moyens frauduleux comme dans l'escroquerie. La chose lui a été remise et il ne la soustrait pas comme dans le vol. L'abus de confiance est la violence de la foi contractuelle. Le droit pénal va intervenir pour sanctionner pénalement la violation d'obligations contractuelles relevant du droit civil, du droit commercial ou du droit de la consommation.
LES CONDITIONS DE L'ABUS DE CONFIANCE
La condition préalable de l'abus de confiance est la remise de la chose en vertu d'un contrat de détention précaire. Les éléments constitutifs sont le détournement volontaire au profit du propriétaire.
Le contrat
Un contrat doit exister en vertu duquel une chose est remise à une personne, à charge pour celle-ci d'en faire un usage déterminé . Le juge du fond apprécie souverainement (sauf dénaturation) la nature du contrat . La nullité ou l'illicéité du contrat ne font pas obstacle à l'existence du délit. Le contrat doit être prouvé selon les modes de preuve du droit civil ou du droit commercial.
Le code pénal n'énumère plus ,comme l'ancien code pénal, les contrats qui peuvent fonder une poursuite. Le contrat doit comporter une obligation de restitution de la chose qui a été confiée ou d'en faire un usage déterminé. Il en est ainsi du dépôt, du louage, du crédit bail, du mandat, du prêt à usage, du gage.
Lorsque le contrat n'emporte pas obligation de restitution, mais au contraire transfère la propriété, comme la vente, il ne peut y avoir abus de confiance.
La chose
La remise qui peut donner lieu à abus de confiance porte sur des fonds, des valeurs mobilières ou des biens quelconques. Ceci exclut les immeubles l'abus de confiance ne peut porter que sur des fonds, des valeurs, ou un bien quelconque, à l'exclusion d'un immeuble ; ... la cour d'appel, qui a réprimé l'utilisation abusive d'un bien immobilier sous le couvert de la non restitution des clefs permettant d'y accéder, a méconnu le sens et la portée du texte susvisé (Cass. crim. 10 octobre 2001) . La chose doit avoir un contenu matériel ce qui exclut les services.
La chose peut être un document quelconque , un fichier clientèle, une carte de crédit, ou simplement le numéro de carte bancaire ( le prévenu a, en connaissance de cause, détourné le numéro de la carte bancaire communiqué par la cliente pour le seul paiement de sa commande et, par là-même, n'en a pas fait l'usage convenu entre les parties, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels, qu'intentionnel, le délit d'abus de confiance dont elle a déclaré le prévenu coupable)(Cass. crim. 14 novembre 2000) , etc.
Les informations relatives à la clientèle constituent un bien susceptible d'être détourné Cass. crim.16 novembre 2011
La remise de la chose
Sans remise il n'y a pas d'abus de confiance, mais cette remise peut être faite directement ou par un tiers.
La remise doit être volontaire et elle droit être précaire. "L'abus de confiance ne peut porter que sur des fonds, valeurs ou bien remis à titre précaire" ( Cass. crim. 19 septembre 2007)
LES ELEMENTS CONSTITUTIFS
Les éléments constitutifs sont le détournement, le préjudice et l'intention
Le détournement
Le détournement , élément matériel du délit
Le détournement est l'élément matériel du délit. Il est réalisé "dès lors que le propriétaire de la chose confiée ne plus exercer ses droits sur elle, par suite des agissements frauduleux de celui qui la détenait" . (Cass. crim. 12 juin 1978).
Le seul fait du détournement caractérise l'abus de confiance sans qu'il soit besoin de mise en demeure. Le détournement est suffisant même si le prévenu ne s'est pas approprié la chose ou n'en a pas tiré un profit personnel (Cass. crim. 10 mai 1989).
La consistance du détournement
Le détournement peut consister en une action ou une omission. Il résulte d'une restitution ou d'une rétention injuste. Il peut aussi résulter d'une utilisation de la chose à des fins autres que celles qui avaient été stipulées, d'un usage abusif et d'un détournement d'affectation.
L'offre de remboursement ou une éventuelle compensation ne peuvent être invoqués.
La preuve du détournement
Le seul défaut de restitution n'est pas une preuve suffisante de l'abus de confiance. L'existence d'un acte de détournement doit être prouvé.
Le préjudice
L'article 314-1 se réfère à un détournement commis "au préjudice d'autrui". Le préjudice résulte du seul fait que le propriétaire se trouve privé de ses droits sur la chose (Cas. crim. 15 mai 1968, 9 avril 1973). Il peut être matériel ou moral, actuel ou éventuel (Cas. crim. 3 janvier 1979)
L'intention
L'intention frauduleuse est requise en raison de l'utilisation du terme "détournement". L'intention résulte de la conscience de la précarité de la détention résultant de l'obligation de restituer et de la conscience d'un éventuel préjudice (Cass. crim. 1993 retrait par la banque de son appui financier).
Concernant l'élément intentionnel on peut citer les décisions suivante
l'élément intentionnel de l'infraction résulte de la connaissance [...]de la situation précaire de sa société et de l'utilisation délibérée qu'il a faite des fonds perçus en paiement des billets d'avion et dont Y était resté propriétaire, à d'autres fins que le remboursement de la partie civile Cass. crim. 24 octobre 2001
LES PEINES
L'abus de confiance est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende.
Circonstances aggravantes
Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 750000 euros d'amende lorsque l'abus de confiance est réalisé :
1º Par une personne qui fait appel au public afin d'obtenir la remise de fonds ou de valeurs soit pour son propre compte, soit comme dirigeant ou préposé de droit ou de fait d'une entreprise industrielle ou commerciale ;
2º Par toute autre personne qui, de manière habituelle, se livre ou prête son concours, même à titre accessoire, à des opérations portant sur les biens des tiers pour le compte desquels elle recouvre des fonds ou des valeurs ;
3º Au préjudice d'une association qui fait appel au public en vue de la collecte de fonds à des fins d'entraide humanitaire ou sociale ;
4º Au préjudice d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.
Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1500000 euros d'amende lorsque l'abus de confiance est réalisé par un mandataire de justice ou par un officier public ou ministériel soit dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, soit en raison de sa qualité.
Abus de confiance ne donnant pas lieu à poursuites
Les dispositions de l'article 311-12 sont applicables au délit d'abus de confiance.
Jurisprudence
Abus_de_confiance_et_titres_dématerialisés
Jurisprudence : Abus_de_confiance
Abus de confiance et sociétés
Commet le délit d'abus de confiance celui qui détourne les fonds d'une société en nom collectif dont il est le gérant Cass. crim. 10 avril 1992
Infractions voisines