Commission de discipline du parquet
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Commission de discipline du parquet
MAGISTRAT - Discipline - Procédure disciplinaire - Comparution devant le Conseil supérieur de la magistrature - Sursis à statuer - Demande - Rejet - Cas
Il n'y a pas lieu de surseoir à statuer sur les poursuites disciplinaires engagées contre un magistrat du parquet, dès lors que le sort des recours ou actions engagés par ce magistrat devant diverses juridictions pour faire juger qu'il ne bénéficie pas des garanties d'un procès équitable est sans incidence sur la procédure administrative disciplinaire dont la Commission de discipline du parquet est saisie pour avis.
MAGISTRAT - Devoirs spécifiques à certaines fonctions - Devoirs spécifiques aux magistrats du parquet - Respect du principe de subordination hiérarchique - Manquement - Applications diverses
Constitue une méconnaissance délibérée de l'obligation hiérarchique et des manquements graves et répétés aux devoirs de son état le fait pour un magistrat du parquet :
- d'avoir prétendu diligenter à plusieurs reprises des procédures dont il n'avait pas à se saisir,
- d'avoir enfreint les instructions expresses qui lui avaient été données de se dessaisir d'une affaire et conservé le dossier par devers lui,
- d'avoir, alors qu'il était interdit de ses fonctions, adressé au ministère de la défense, sous le timbre du parquet, un document prétendant mettre l'action publique en mouvement pour atteinte à la Constitution, afin de saisir des documents se rapportant à la Gestapo et à la Wehrmacht,
- d'avoir transmis à un huissier de justice un mandement établi sous le timbre du parquet et destiné à un journaliste de télévision pour lui faire injonction de cesser le rappel quotidien, à l'antenne de cette chaîne de télévision, de la détention arbitraire d'otages français à l'étranger.
MAGISTRAT - Devoirs fondamentaux - Devoirs liés à l'état de magistrat - Obligation d'assumer ses fonctions - Manquement - Applications diverses - Refus de tout service
Commet une faute susceptible de sanction disciplinaire le magistrat du parquet qui refuse tout service et contraint par son attitude son supérieur hiérarchique, dans le souci d'un fonctionnement normal de son parquet, à remettre les attributions de ce magistrat à d'autres magistrats.
MAGISTRAT - Devoirs fondamentaux - Devoir de réserve - Manquement - Caractérisation Défaut - Applications diverses - Participation à une manifestation sur la voie publique - Condition
Ne constitue pas un manquement à l'obligation de réserve le fait pour un magistrat d'avoir pris part à une manifestation sur la voie publique, dès lors qu'il n'est pas établi qu'il ait contribué au blocage de la voie publique réalisé à cette occasion.
MAGISTRAT - Devoirs fondamentaux - Devoir de réserve - Manquement - Caractérisation - Applications diverses - Ecrits infamants ou injurieux
Constitue un manquement aux devoirs de son état le fait pour un magistrat du parquet :
- d'avoir adressé à son procureur ou au procureur général des écrits injurieux ou diffamatoires, méprisants, voire menaçants, à l'égard du premier,
- d'avoir adressé au Garde des sceaux, aux directeurs de l'administration centrale et à un autre magistrat du même parquet, de nombreuses correspondances renfermant des attaques grossières, des imputations injurieuses et des invectives violentes à l'égard des destinataires.
MAGISTRAT - Discipline - Sanction - Appréciation - Eléments pris en considération - Malhonnêteté étrangère aux faits fautifs
Si une conception personnelle des missions du ministère public, des attributions et pouvoirs respectifs des substituts et procureurs, ainsi que les principes d'une stratégie faisant du conflit le moyen de promouvoir certaines idées développées par le magistrat du parquet pour sa défense ne sont pas de nature à justifier les faits relevés à sa charge, il convient, pour l'appréciation de la sanction disciplinaire susceptible d'être prononcée, de remarquer qu'aucun de ces faits ne révèle chez leur auteur la moindre trace de malhonnêteté.
Textes appliqués :Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, modifiée par la loi organique n° 70-642 du 17 juillet 1970, notamment les articles 63, 64, 65.
15 mai 1987
Mise à la retraite d'office
[Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, article 45, 6°]
La Commission de discipline du parquet, sur la poursuite disciplinaire exercée à l'encontre de M. X..., substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de V...,
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée par la loi organique n° 70-642 du 17 juillet 1970, notamment les articles 63, 64 et 65 de ce texte ;
Vu les dépêches en date des 6 octobre 1986 et 20 novembre 1986 de M. le Garde des sceaux, ministre de la justice, transmettant le dossier personnel de M. X., substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de V., à M. le procureur général près la Cour de cassation, président de la Commission de discipline du parquet, et le priant de réunir la Commission afin de lui soumettre, pour avis, les faits reprochés au magistrat du parquet précité ;
Vu les auditions en date des 17 décembre 1986, 9 janvier 1987, 23 janvier 1987, 30 janvier 1987 et, à sa demande expresse, le 19 février 1987, de M. X., son dossier personnel lui ayant été préalablement communiqué et mis à la disposition de ses conseils par M. Yves Jouhaud, conseiller à la Cour de cassation, désigné en qualité de rapporteur par arrêté de M. le procureur général près la Cour de cassation en date du 30 octobre 1986 ;
Considérant que M. X... a comparu les 6 et 7 mai 1987 devant la Commission de discipline du parquet, assisté de Mlle Lenoir, premier juge au tribunal de grande instance de Nancy, et de M. Janin, juge des enfants au tribunal de grande instance de Versailles ; que M. Viricelle, directeur des services judiciaires au ministère de la justice, a été entendu puis substitué par M. Darcos, sous-directeur de la magistrature ; que M. X... et ses conseils, le directeur des services judiciaires et les membres de la Commission ont dispensé M. Jouhaud de la lecture intégrale de son rapport qui leur avait été préalablement communiqué ; que Mlle Lenoir et M. Janin sont intervenus ; que M. X... a fourni ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui étaient reprochés et a eu la parole le dernier ; que l'affaire a été mise en délibéré, M. X... étant informé que l'avis serait porté à sa connaissance le 15 mai 1987 ;
Considérant que M. X... a déposé des conclusions préalables ; que la Commission a répondu sur le champ aux conclusions tendant à voir ordonner la publicité des débats, la caducité des poursuites disciplinaires, constater l'inexistence légale de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, l'incompétence de la Commission pour statuer sur son cas, et la violation des droits de la défense, ainsi que celles relatives à l'indépendance et à l'impartialité des magistrats composant la Commission de discipline du parquet ; que ces conclusions ont été rejetées par décisions versées au dossier sous les côtes C 379 et C 380 et annexées au présent avis ; que la Commission a joint au fond les autres conclusions énumérées ci-après ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer afin que M. X... puisse faire reconnaître par la commission européenne des droits de l'homme saisie le 3 mai 1987 que la procédure disciplinaire suivie contre lui ne présente pas les garanties d'un procès équitable au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer jusqu'à décision de la Cour de justice des Communautés européennes sur un recours formé par M. X..., et à ce qu'il soit soumis à cette juridiction une question préjudicielle ainsi conçue : « est-il conforme au droit communautaire que la seule application des lois en vigueur dans la mise en mouvement de l'action publique conduise un magistrat d'un Etat membre de la Communauté à répondre sans garantie statutaire de ses actes devant des instances disciplinaires ? »
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer jusqu'à décision judiciaire définitive sur l'intervention de M. X... lors de l'installation de son successeur en qualité de juge d'instance à F.
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer eu égard à une demande présentée par M. X... en révision d'une décision antérieure le concernant
Considérant que le sort de ces recours ou actions introduits par M. X..., à les supposer même fondés, est sans incidence sur la procédure administrative disciplinaire dont la Commission est saisie pour avis en application des dispositions de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ; qu'en conséquence, la Commission rejette comme mal fondées les conclusions susvisées ;
Sur les conclusions déposées par M. X... en vue de l'audition de témoins et d'experts
Considérant qu'au cours des débats, M. X... a fait connaître qu'il entendait renoncer à cette demande ;
Considérant que M. X..., nommé par décret du 26 août 1981 substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de V... et installé dans ses fonctions le 20 janvier 1982, est déféré devant la Commission de discipline du parquet pour y répondre des faits qui lui sont reprochés par les dépêches de M. le Garde des sceaux, ministre de la justice, des 6 octobre et 20 novembre 1986 ; que le ministre de la justice a exclu de la saisine de la Commission les faits commis antérieurement à sa nomination en qualité de Garde des sceaux, le 20 mars 1986, sauf le cas où un fait commis avant cette date aurait continué de l'être après ;
Sur le grief de méconnaissance de l'obligation hiérarchique
Considérant que M. X... a, à plusieurs reprises, prétendu diligenter des procédures dont il n'avait pas à se saisir ;
Considérant en effet que ce magistrat est intervenu dans les procédures judiciaires consécutives aux plaintes des époux Y. contre M. Z..., ancien syndic ; qu'agissant à l'encontre des instructions formelles que le procureur de la République, en vertu de son pouvoir hiérarchique, lui avait notifiées, tant verbalement que par écrit et à plusieurs reprises, M. X... a pris différentes initiatives intempestives à l'encontre de M. Z... ; qu'ainsi, le 20 mars 1986, à l'occasion d'un acte d'instruction dont Mme A., juge d'instruction à V... , avait été chargée par un arrêt de la chambre d'accusation ordonnant un supplément d'information dans une procédure suivie contre M. Z... des chefs de violation de domicile et vol, M. X... prétendait procéder à l'arrestation de M. Z... et provoquait un incident sérieux qui contraignait un autre magistrat du parquet à intervenir pour protéger les droits de l'inculpé ; que le 29 septembre 1986, M. X..., alors interdit de ses fonctions depuis le 22 mai 1986, intervenait à nouveau dans la procédure suivie contre M. Z..., en adressant des réquisitions au juge d'instruction qui refusait d'y donner suite, puis en décernant mandat d'amener contre ce magistrat à qui il reprochait son comportement professionnel en termes véhéments ; qu'il y a lieu de remarquer que, s'agissant d'actes d'instruction accomplis dans le cadre d'un supplément d'information ordonné par la chambre d'accusation, le parquet de V... était incompétent pour y prendre part (article 205 du Code de procédure pénale) ;
Considérant que M. X..., à l'occasion d'une procédure consécutive au décès d'un jeune homme et classée sans suite par décision du procureur de la République, a enfreint les instructions expresses qui lui avaient été données de se dessaisir de cette affaire en conservant le dossier par devers lui ;
Considérant que le 26 septembre 1986, M. X..., alors interdit de ses fonctions, a adressé, sous le timbre du parquet de V..., au ministre de la défense un document prétendant mettre en mouvement l'action publique contre X... du chef d'attentat à la Constitution aux fins, dans un premier temps, de se transporter au siège de la DGSE à Paris pour y saisir des documents d'archives se rapportant à la Gestapo et à la Wehrmacht ;
Considérant que le 29 septembre 1986, M. X... transmettait à un huissier de justice, pour qu'il le signifie, un mandement, établi sous le timbre du parquet de V..., à M. B... lui enjoignant de faire cesser le rappel quotidien sur Antenne 2 de la détention arbitraire d'otages français au Liban ;
Considérant que ces faits, commis pour certains d'entre eux alors que l'exercice de ses fonctions lui avait été interdit, caractérisent à la charge de M. X..., magistrat du parquet, une méconnaissance délibérée de l'obligation hiérarchique, et des manquements graves et répétés aux devoirs de son état ;
Sur le grief de refus de service
Considérant que le procureur de la République, s'il ne peut retirer toutes fonctions à un magistrat de son parquet, peut, à tout moment, conformément à l'intérêt du service, modifier les attributions de ses substituts ainsi que le prévoient les articles R. 311-34 et R. 311-35 du Code de l'organisation judiciaire ;
Considérant qu'en octobre 1985, M. X..., tant par ses paroles que par actes, a refusé de remplir dans les conditions de la loi les attributions qui lui étaient confiées ; que c'est ainsi par exemple qu'il a refusé d'occuper le siège du ministère public à l'audience du 8 octobre 1985, invoquant des menaces que lui aurait adressées le président du Conseil supérieur de la magistrature ; qu'il a ensuite transmis au président du Conseil supérieur de la magistrature des dossiers d'instruction qu'il était chargé de régler, avec un document établi à en-tête du tribunal aux termes duquel : « l'action publique devant les juridictions relevant du tribunal de grande instance de V... fait l'objet, de la part de ceux là même qui devraient veiller à son libre et légal exercice, des sabotages les plus cyniques pour les lois concernées et les plus méprisants pour les justiciables concernés » ;
Qu'en remettant les attributions de M. X... à d'autres magistrats, le procureur n'a fait que prendre acte de cette attitude et en tirer les conséquences dans le souci d'un fonctionnement normal de son parquet ; que M. X... n'ayant pas modifié son comportement, aucune attribution ne pouvait lui être confiée jusqu'au 22 mai 1986, date à laquelle le Garde des sceaux lui interdisait ses fonctions ;
Considérant que M. X..., en refusant tout service à partir d'octobre 1985, a commis une faute qui ne peut qu'être sanctionnée disciplinairement ;
Sur le grief de manquements au devoir de réserve
Considérant qu'assigné à comparaître le 29 mai 1986 devant le tribunal d'instance de C... par M. Z..., pour y répondre d'injures non publiques, M. X..., déjà condamné à des réparations civiles envers M. Z... pour des faits analogues, d'une part tentait d'assigner son adversaire devant le tribunal correctionnel de V..., d'autre part, annonçait à un magistrat du parquet de C. sa décision de venir à l'audience pour procéder, avec l'aide des forces de police ou au besoin « l'aide des citoyens », à l'arrestation de M. Z... ; que cette réaction déterminait le Garde des sceaux à interdire à M. X... l'exercice de ses fonctions ; que le 29 mai 1986, M. X... se présentait à l'audience accompagné d'une vingtaine de personnes ; qu'il annonçait publiquement sa volonté d'arrêter M. Z... mais y renonçait à la suite de l'intervention d'un fonctionnaire de police ;
Que si le Garde des sceaux a pu à bon droit retenir à la charge de M. X... les menaces d'arrestation formulées directement ou indirectement contre M. Z..., il y a lieu de relever que le tribunal d'instance de C... a débouté M. Z... de ses demandes en dommages-intérêts pour injures non publiques, retenant que M. X... avait agi dans l'exercice de ses fonctions et bénéficiait de l'immunité qui s'attache aux actes du ministère public ;
Considérant que la Commission n'a pas retenu comme faute disciplinaire le grief fait à M. X... d'avoir pris part, le 28 juillet 1986, près de D..., à une manifestation de la Mutuelle d'action et de défense des artisans et commerçants destinée à soutenir les revendications d'une entreprise de sous-traitance qui n'avait pas été rémunérée pour son travail, dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a contribué au blocage de la voie publique réalisé à cette occasion ;
Considérant que la Commission n'a pas retenu non plus comme faute disciplinaire la lettre adressée le 3 septembre 1986 par M. X... à M. B..., syndic, appelé à comparaître devant le tribunal correctionnel de E... ;
Sur le grief d'avoir adressé à différentes autorités des écrits contenant des insultes, des propos outranciers et des invectives
Considérant que M. X..., en diverses occasions, a adressé au procureur de la République de V... des écrits lui reprochant, en termes injurieux, méprisants et parfois menaçants, d'avoir renoncé aux devoirs de sa fonction comme au respect de la loi et « d'être entré en voie de délinquance et de parjure » ; qu'en outre certaines lettres écrites au procureur général près la cour d'appel de W... contiennent des allégations et imputations de même nature à l'encontre du chef du parquet de V... ;
Considérant que de nombreuses correspondances adressées après le 22 mai 1986 par M X... soit au Garde des sceaux, soit à différents directeurs de l'administration centrale, soit à un magistrat du parquet de V..., renferment des attaques grossières, des imputations injurieuses et des invectives violentes à l'encontre des destinataires ; qu'ainsi, par exemple, M. X... écrivait le 25 octobre 1986 au directeur des services judiciaires : « Vous êtes donc prêt (...) à couvrir ou obéir à n'importe quoi, à commettre le plus odieux, et le déploiement des forces de police pour m'interdire l'accès d'un couloir du palais de justice de V... ne trouble ni votre âme de républicain, ni votre conscience de magistrat » ; que le 5 août 1986, il écrivait au directeur des affaires criminelles et des grâces : « ... déjà 75 jours d'arbitraire triomphant de la médiocrité sans scrupule qui règne à la chancellerie (...) la dépravation délibérément organisée de l'institution judiciaire (...) les assignations scandaleuses de l'ex-syndic Z... - dont vous continuez tout aussi scandaleusement de couvrir l'activité délinquante... » ; que le 27 octobre 1986, il apostrophait par écrit le Garde des sceaux en ces termes : « Est-ce que vous vous rendez compte, M. le Garde des sceaux, de la portée de ce que vous venez d'écrire ? » ;
Considérant que ces correspondances caractérisent autant de fautes disciplinaires à la charge de M. X... qui a ainsi manqué aux devoirs de son état ;
Considérant que M. X... a développé pour sa défense une conception personnelle des missions du ministère public, des attributions et pouvoirs respectifs des substituts et des procureurs de la République, ainsi que les principes d'une stratégie faisant du conflit le moyen de promouvoir certaines idées ;
Considérant que la Commission ne saurait retenir ces idées et ces principes comme pouvant justifier les faits relevés à la charge de M. X... ;
Qu'elle remarque cependant qu'aucun de ceux-ci ne révèle chez leur auteur la moindre trace de malhonnêteté ;
Considérant qu'ainsi la Commission retient à la charge de M. X... les fautes disciplinaires susvisées qui caractérisent des manquements graves, répétés ou continus aux obligations résultant de l'article 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, ainsi rédigé : « Tout, manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute disciplinaire. Cette faute s'apprécie pour un membre du parquet (...) compte tenu des obligations qui découlent de sa subordination hiérarchique » ;
Par ces motifs,
La Commission, après en avoir délibéré à huis clos, émet l'avis que soit prononcée à l'encontre de M. X... la sanction de la mise à la retraite d'office prévue par l'article 45, 6°, de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.
Dit que le présent avis sera transmis à M. le Garde des sceaux, ministre de la justice, par les soins du procureur général près la Cour de cassation, président de la Commission de discipline du parquet.
Décision du Garde des sceaux : Conforme (19 juin1987).
Substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de V.
Président : M. Arpaillange - Rapporteur : non précisé - Secrétaire : M. Cuinat
Recours :Saisine du Conseil d'Etat par requête n° 89204 ; Rejet de la requête par arrêt du 11 juillet 1991, inédit au Recueil Lebon.
MAGISTRAT - Discipline - Pouvoir disciplinaire - Exercice - Conseil supérieur de la magistrature - Formation compétente pour la discipline des magistrats du parquet - Avis - Nature - Portée
Les avis de la Commission de discipline du parquet ne constituent pas des décisions faisant grief, susceptibles d'être déférées à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir.
MAGISTRAT - Discipline - Pouvoir disciplinaire - Exercice - Fondement - Détermination - Portée
Le magistrat du parquet poursuivi disciplinairement n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ne lui sont pas applicables, dès lors que, si cette ordonnance a force de loi et a été adoptée par le gouvernement dans le cadre des pouvoirs qu'il tenait des articles 64 et 92 de la Constitution, elle n'avait pas, en l'absence de dispositions spéciales le prescrivant, à être promulguée par décret du Président de la République.
MAGISTRAT - Discipline - Pouvoir disciplinaire - Exercice - Compétence - Appréciation - Moment - Détermination - Portée
Le Garde des sceaux, ministre de la justice, est compétent pour prononcer des sanctions disciplinaires à l'encontre d'un magistrat du parquet ayant cette qualité à la date des sanctions incriminées.
MAGISTRAT - Discipline - Procédure disciplinaire - Comparution devant le Conseil supérieur de la magistrature - Garanties accordées au magistrat - Publicité des débats - Exclusion - Portée
Manque en fait le moyen tiré de ce que la procédure disciplinaire concernant un magistrat du parquet n'aurait été assortie d'aucune garantie juridictionnelle, dès lors :
- qu'il n'est pas établi que la Commission de discipline du parquet, régulièrement composée, ait compté parmi ses membres un magistrat ayant fait preuve d'animosité envers l'intéressé ;
- qu'il n'est pas non plus établi que le dossier au vu duquel la Commission a émis son avis et qui a été communiqué au magistrat poursuivi ait été incomplet ;
- que les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'étant pas applicables aux commissions consultatives disciplinaires, le magistrat n'est pas fondé à soutenir qu'en application de cet article, la Commission de discipline aurait dû siéger en audience publique ;
- que la décision de sanction prise par le Garde des sceaux a le caractère d'une décision administrative qui peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
MAGISTRAT - Discipline - Pouvoir disciplinaire - Exercice - Domaine d'application - Faute disciplinaire - Caractérisation - Nécessité
Le Garde des sceaux, ministre de la justice, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation de la gravité des fautes commises par un magistrat du parquet et a pu prononcer la mise à la retraite d'office de ce magistrat, dès lors que les griefs retenus à l'encontre du magistrat - tirés de la méconnaissance des obligations hiérarchiques découlant de ses fonctions de substitut du procureur de la République, de son refus de traiter des dossiers qui lui étaient confiés, de ses interventions - bien qu'il fasse l'objet d'un arrêté ministériel d'interdiction de fonctions - dans des dossiers dont il n'était pas saisi, de l'envoi au procureur de la République et à diverses autorités judiciaires de correspondances rédigées en des termes outrageants -, ne sont pas matériellement inexacts et étaient de nature à justifier une sanction.
[Sommaire 4] - Sur l'exclusion de l'application de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au contentieux disciplinaire des magistrats, dans le même sens que :
- S 43 (2) - 7 février 1981,
- S 54 - 18 juin 1991,
- S 78 - 20 juillet 1994,
- S 83 (2) - 12 avril 1995,
- Conseil d'Etat, 5 mai 1982, requête n° 33724, sommaire 2, [recours sur S 44],
- Conseil d'Etat, 21 novembre 1990, requête n° 101148, sommaire 1, [recours sur S 50],
- Conseil d'Etat, 18 octobre 2000, requête n° 208168, sommaire 1, [recours sur P 35],
- Conseil d'Etat, 2 novembre 2002, requête n° 225341, sommaire 1, [recours sur S 111],
- Conseil d'Etat, 25 juin 2003, requête n° 236090, [recours sur S 116],
- Conseil d'Etat, 28 juillet 2004, requête n° 260760, sommaire 1, [recours sur S 127],
- Commission EDH, 4 décembre 1984, requête n° 9931/82, X. magistrat c. France (inédit),
- Cour EDH, 8 février 2001, G. Pitkevich c. Fédération de Russie, Requête n° 47936/99,
- Cour EDH, 1er juillet 2003, K. Dziautas c. Lituanie, requête n° 59330/00.
Sur l'exclusion de l'application de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au contentieux disciplinaire des magistrats, en sens contraire :
- P 29 (1) - 11 juin 1996,
- S 93 - 11 septembre 1996.
Sur l'application de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au contentieux disciplinaire des avocats, à rapprocher :
- Conseil d'Etat, Assemblée, 14 février 1996, Maubleu, requête n° 132369, Rec. Lebon, p. 34,
- 1re Civ., 10 janvier 1984, Bull., I, n° 8, p. 6, (rejet),
- 1re Civ., 12 février 1991, Bull., I, n° 60, p. 38, (rejet), solution implicite,
- 1re Civ., 22 mai 2002, Bull., I, n° 140, p. 107, (rejet), et les arrêts cités.
Sur l'application de l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au contentieux disciplinaire de la fonction publique, à rapprocher :
- Conseil d'Etat, 23 février 2000, L'Hermite, requête n° 192480, Rec. Lebon, p. 101.
Sur la publicité de l'audience disciplinaire devant le Conseil supérieur de la magistrature, dans le même sens que :
- S 54 - 18 juin 1991,
- S 78 - 20 juillet 1994,
- S 83 (2) - 12 avril 1995,
- Conseil d'Etat, 5 mai 1982, requête n° 33724, sommaire 2, [recours sur S 44],
- Conseil d'Etat, 18 octobre 2000, requête n° 208168, sommaire 1, [recours sur P 35].
Sur la publicité de l'audience disciplinaire devant le Conseil supérieur de la magistrature, en sens contraire :
- P 29 (1) - 11 juin 1996.
Sur la publicité de l'audience dans le contentieux disciplinaire des avocats, à rapprocher :
- Conseil d'Etat, Assemblée, 14 février 1996, Maubleu, requête n° 132369, Rec. Lebon, p. 34,
- 1re Civ., 10 janvier 1984, Bull., I, n° 8, p. 6, (rejet),
- 1re Civ., 22 mai 2002, Bull., I, n° 140, p. 107, (rejet), et les arrêts cités.
Sur la publicité de l'audience dans le contentieux disciplinaire de la fonction publique, à rapprocher :
- Conseil d'Etat, 23 février 2000, L'Hermite, requête n° 192480, Rec. Lebon, p. 101.
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