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Texte du Tribunal de Montreuil sur l’ASE

Texte du Tribunal de Montreuil sur l’ASE

décembre 9th, 2012 | Posted by georges in Information
 

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Texte du Tribunal de Montreuil sur l’ASE

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TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MONTREUIL
N° 1107210
___________
Mme Fatimata F.
___________
Mme Nozain
Rapporteur
___________
M. Mazaud
Rapporteur public
___________
Audience du 16 octobre 2012
Lecture du 6 novembre 2012
___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Montreuil
(5ème chambre)
C
04-02-02
Vu la requête, enregistrée le 26 août 2011, présentée par Mme Fatimata F., demeurant à … ; Mme F. demande au tribunal :
1°) d’annuler la décision en date du 6 août 2011 par laquelle le président du conseil général du département de la Seine-Saint-Denis a refusé de prolonger, au-delà du 31 août 2011, une aide financière au titre de l’aide sociale à l’enfance ;
2°) d’enjoindre au département de la Seine-Saint-Denis de reprendre le versement de l’aide financière au titre de l’aide à domicile sous 48 heures à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
Elle soutient qu’en vertu de l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000, elle aurait du être invitée à présenter ses observations ; que la décision est illégale du fait de l’illégalité des articles 1er et 2 du règlement départemental des aides financières du département de la Seine-Saint-Denis ; qu’elle est entachée d’erreur de droit en ce qu’elle mentionne que la prise en charge de son hébergement ne relève pas de la compétence du département de la Seine-Saint-Denis ; qu’en lui retirant le bénéfice d’une décision d’attribution d’aide sociale en l’absence d’éléments nouveaux dans sa situation, elle méconnait les dispositions de l’article R. 131-3 du code de l’action sociale et des familles ; qu’elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une erreur de droit dès lors que le département considère que ses ressources sont suffisantes et qu’elle ne remplit pas les conditions de l’article L. 222-2 du code de l’action sociale et des familles ; que la décision est entachée de détournement de pouvoir et méconnait l’autorité de la chose jugée en ce qu’elle a pour seul but de faire échec à l’ordonnance du juge des référés du 27 juin 2011, la privant ainsi du droit à un recours effectif et à un procès équitable ; que le département a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des
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conséquences de sa décision sur son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que la décision viole les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l’homme et de l’article 3 de la convention internationale des droits de l’enfant ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 février 2012, présenté par le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par le président du conseil général en exercice, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que le règlement départemental des aides financières a uniquement pour objet de préciser et d’organiser les conditions d’octroi des aides légales et extra légales du département ; que l’hébergement et le logement sont des compétences dévolues à l’Etat par la loi ; qu’ainsi, l’aide à l’hébergement dont a bénéficié la requérante est une aide extra-légale que le département a mise en place de sa propre initiative ; que le règlement départemental ne fait que rappeler le caractère subsidiaire de l’aide sociale dont le principe est posé par l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles ; qu’en l’espèce, l’exception d’illégalité du règlement départemental ne peut être invoquée puisque la décision concerne une aide octroyée sans obligation légale par le département ; que la décision initiale d’attribution d’une aide financière n’était créatrice de droit que jusqu’à son expiration le 31 mars 2006 ; que le plus jeune enfant de la requérante ayant eu trois ans le 27 juillet 2010, depuis cette date, l’hébergement de sa mère ne relève plus de la compétence du département sur le fondement du 4° de l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles ; que si les dispositions de l’article L. 222-2 et L. 222-3 du code de l’action sociale et des familles n’excluent pas que l’aide à domicile puisse permettre la prise en charge des frais de logement, pour autant elles n’attribuent pas au département la charge de pourvoir au logement du demandeur ; qu’il ne peut être reproché au département de décider qu’une aide extra légale accordée à l’initiative du département ne sera versée que de manière ponctuelle et exceptionnelle ; qu’il n’a pas commis d’erreur de droit au regard des conditions de l’article L. 222-2 du code de l’action sociale et des familles ; qu’en l’espèce, les difficultés financières de la requérante ont un caractère permanent sans que l’aide apportée par le département ait permis de faire évoluer la situation ; qu’il n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation à ce sujet ; qu’en abrogeant la décision contestée du 22 février 2011, puis en réexaminant la situation de la requérante et en prenant une nouvelle décision, le département n’a fait qu’exécuter au mieux l’ordonnance du juge des référés du 27 juin 2011 qui suspendait la décision du 22 février 2011 et n’était assortie d’aucune mesure provisoire ; que l’annulation pour excès de pouvoir d’une décision de refus d’aide entraîne en principe seulement l’obligation pour l’administration de prendre à nouveau une décision après une nouvelle instruction ;
Vu le mémoire, enregistré le 23 mars 2012, présenté pour Mme F., qui conclut aux mêmes fins que la requête ;
Elle ajoute qu’un demandeur qui justifie être dépourvue d’hébergement et ne pouvoir subvenir à ce besoin essentiel démontre bien qu’il rencontre des difficultés risquant de porter atteinte à la sécurité, à l’entretien et à l’éducation de ses enfants, conformément à l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles ; que, dès lors, s’il justifie ne pas disposer de ressources suffisantes, il est bien fondé à demander, dans le cadre des différentes formes d’aide prévues à l’article L. 222-3 du même code, l’attribution d’une aide financière ; que, dans ces conditions, le département est parfaitement compétent pour attribuer une aide financière en vu du paiement des frais d’hôtel ou de toute autre forme d’hébergement d’une famille dépourvue d’hébergement et ne disposant pas de ressources suffisantes ; qu’il appartient à l’autorité
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administrative, en application de l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles, d’inviter les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil, à indiquer l’aide qu’ils peuvent apporter aux demandeurs d’aide sociale ; qu’en prenant comme point de départ a décision initiale de févier 2006 et en notifiant l’arrêt définitif du versement de toute aide pour financer un séjour à l’hôtel, la décision attaquée est bien la cessation d’une décision créatrice de droits soumise en conséquence aux dispositions de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 juillet 2012, présenté par le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par le président du conseil général, qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;
Il ajoute que seule la prise en charge pour la période allant de novembre 2006 à juillet 2010 était à la charge obligatoire du département en application du 4°de l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles ; que l’aide n’a pas été sollicitée eu égard à une situation de danger ou de risque pour la santé des enfants de la requérante ; qu’au cas de l’espèce, la prise en charge financière de l’hébergement de la requérante relève désormais de la compétence de l’Etat ; que l’évaluation préalable faite par le service social municipal en date du 31 janvier 2011 concerne une « demande d’aide financière pour l’hôtel » en vue de la « commission hôtel » du 2 février 2011 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 octobre 2012 :
- le rapport de Mme Nozain, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Mazaud, rapporteur public ;
1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le département de la Seine-Saint-Denis a pris en charge sans interruption les frais d’hébergement à l’hôtel de Mme F. et de ses trois enfants depuis le mois de février 2006 ; que, par la décision attaquée, qui lui a été notifiée le 6 août 2011, le département a décidé d’interrompre le versement de l’aide à compter du 1er septembre 2011 aux motifs que « l’hébergement d’urgence est une compétence de l’Etat par le biais du dispositif du 115 ou des C.H.R.S », qu’elle ne remplit pas les conditions posées par le code de l’action sociale et des familles et par le règlement départemental des aides financières du département de la Seine-Saint-Denis pour continuer de percevoir une aide financière en ce qu’elle ne relève plus de la compétence du département au titre de l’aide sociale à l’enfance depuis le mois d’août 2010 et qu’elle justifie de ressources régulières et conformes aux minima légaux en vigueur ;
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Sur les conclusions aux fins d’annulation et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 121-1 du code de l’action sociale et des familles : «Le département définit et met en oeuvre la politique d’action sociale, en tenant compte des compétences confiées par la loi à l’Etat, aux autres collectivités territoriales, ainsi qu’aux organismes de sécurité sociale» ; qu’aux termes de l’article L. 222-1 du même code : « Sans préjudice des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire, les prestations d’aide sociale à l’enfance mentionnées au présent chapitre sont accordées par décision du président du conseil général du département où la demande est présentée» ; qu’aux termes de l’article L. 222-2 du dudit code : « L’aide à domicile est attribuée sur sa demande, ou avec son accord, à la mère, au père ou, à défaut, à la personne qui assume la charge effective de l’enfant, lorsque la santé de celui-ci, sa sécurité, son entretien ou son éducation l’exigent et, pour les prestations financières, lorsque le demandeur ne dispose pas de ressources suffisantes. » ; qu’aux termes de l’article L. 222-3 de ce code de l’action sociale et des familles : « L’aide à domicile comporte ensemble ou séparément (…) le versement d’aides financières, effectué sous forme soit de secours exceptionnels, soit d’allocations mensuelles (…) » ; qu’il résulte de ces dispositions que si les prestations d’aide sociale à l’enfance versées au titre de l’aide à domicile n’ont pas vocation à remédier structurellement aux éventuelles défaillances du système d’hébergement d’urgence, comme à la durée de traitement des demandes de logement prioritaire, le département ne peut légalement refuser le bénéfice de ces prestations en se bornant à se référer à des obligations distinctes pesant sur l’Etat au titre de la mise en oeuvre du droit à l’hébergement d’urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique et sociale, dans les conditions prévues par les articles L. 345-2, L. 345-2-1 et L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles ;
3. Considérant que le père, la mère ou la personne assurant la charge effective de l’enfant, qui ne disposent pas de ressources suffisantes pour en assurer la santé, la sécurité, l’entretien ou l’éducation et donc, le cas échéant, pour se loger, ont droit à des prestations financières en application des dispositions précitées des articles L. 121-1, L. 222-1, L. 222-2 et L. 222-3 du code de l’action sociale et des familles ; que si, par nature, les aides sociales instituées par les mêmes dispositions présentent un caractère provisoire, elles ne peuvent cependant être légalement accordées ou refusées qu’en considération de la situation particulière des personnes qui les sollicitent ;
4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme F., mère isolée de deux enfants, est dépourvue de travail, sans logement depuis la naissance de son dernier enfant le 25 juillet 2007, et ne perçoit que le revenu de solidarité active ainsi que des allocations familiales ; que, malgré les obligations incombant légalement au département de la Seine-Saint-Denis au titre de l’aide sociale à l’enfance en application des dispositions sus rappelées des articles L. 222-2 et L. 222-3 du code de l’action sociale et des familles, dans le cadre de l’aide à domicile, le suivi social de Mme F. s’est limité aux rendez-vous mensuels avec l’assistante sociale de secteur d’Aulnay-sous-Bois pour le renouvellement de son hébergement dans une résidence hôtelière ; que, si la décision attaquée oppose à Mme F. la circonstance qu’elle n’a pas fait valoir des droits à pension alimentaire, notamment auprès du père de son plus jeune enfant, le président du conseil général n’a pas procédé à l’examen de sa situation au regard de tels droits en se bornant à constater qu’elle n’avait pas fait valoir son obligation d’aliments et lui oppose la circonstance qu’elle bénéficie de ressources conformes aux minima sociaux alors même qu’elle est dépourvue de logement, en l’invitant à saisir le service de l’Etat compétent pour lui permettre
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de bénéficier d’un hébergement d’urgence ; que les deux enfants de la requérante se trouvent, dans ces conditions, confrontés à des difficultés affectant la santé, la sécurité, l’entretien ou l’éducation, qui sont susceptibles de compromettre gravement leur équilibre ; que Mme F. est ainsi fondée à soutenir que le président du conseil général du département de la Seine-Saint-Denis, qui a commis une erreur de droit au regard des dispositions des article L. 222-2 et L. 222-3 du code de l’action sociale et des familles, l’aide financière mensuelle versée pour son hébergement relevant de l’aide à domicile, a aussi commis une erreur manifeste en appréciant que le revenu social d’activité et les prestations familiales qu’elle perçoit sont des ressources suffisantes pour assumer la charge effective d’une famille de deux enfants dont la mère est dépourvue de logement ; qu’en conséquence, la décision du 6 août 2011 refusant à Mme F. une aide financière pour son hébergement au-delà du 31 août 2011 doit être annulée ;
Sur les conclusions à fin d’injonction sous astreinte :
5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution » ; qu’aux termes de l’article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public (…) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;
6. Considérant que le présent jugement implique nécessairement que le département de la Seine-Saint-Denis procède à un nouvel examen de la situation de Mme F. et se prononce sur son droit à la prestation demandée au titre de l’aide sociale à l’enfance ; qu’il y a lieu, par suite, d’ordonner au département de procéder à cette nouvelle instruction et de se prononcer dans un délai d’un mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu’il soit besoins de prescrire l’astreinte par jour de retard qu’elle demande ; que les conclusions de la requérante tendant à ce qu’il soit enjoint au département de la Seine-Saint-Denis de reprendre le versement de l’aide financière pour son hébergement, au titre de l’aide à domicile, doivent être rejetées dès lors que le Tribunal ne dispose d’aucun élément relatif à la situation de l’intéressée à la date où il statue ;
D E C I D E :
Article 1er : La décision en date du 6 août 2011 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Saint-Denis a refusé d’octroyer à Mme F. l’aide financière qu’elle sollicitait au titre de l’allocation mensuelle d’aide sociale à l’enfance est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au département de la Seine-Saint-Denis de procéder à un nouvel examen des droits de Mme F. au titre de l’aide à domicile dans le délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme Fatimata F. et au département de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l’audience du 16 octobre 2012, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président,
M. Colera, premier conseiller,
Mme Nozain, premier conseiller,
Lu en audience publique le 6 novembre 2012.
Le rapporteur,
Signé
M.-C. Nozain
Le président,
Signé
P.-L. Albertini
Le greffier,
Signé
T. Timera
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.



13/04/2013
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