Agir en justice : qui peut le faire et à quel moment ?
Toute personne a un droit d’accès au juge. Pour autant, toutes les demandes ne peuvent pas être présentées au juge. Seules celles qui comportent une véritable prétention juridique peuvent être tranchées par un juge. Ainsi, pour pouvoir agir en justice, le demandeur doit avoir un intérêt à agir, la capacité et la qualité pour ce faire et doit respecter les délais qui lui sont impartis.
Celui qui exerce une action en justice doit avoir un intérêt à le faire. L’intérêt à agir découle à la fois de l’existence d’un préjudice et de la possibilité de tirer un avantage du procès.
En droit français, pour pouvoir intenter une action en justice, il faut avoir un intérêt personnel, légitime, actuel et direct.
Exemple
Vous ne pouvez pas engager de procès à l’encontre du personne si ce n’est pas vous qui subissez le préjudice. Ainsi, vous ne pourrez pas engager un procès contre un magazine parce qu’il a pris en photo votre star préférée à son insu.
Mais si vous subissez un préjudice du fait de la souffrance d’un de vos proches vous pourrez saisir la justice.
Ces conditions ont été posées afin de limiter l’encombrement des tribunaux.
► l’intérêt à agir doit être personnel, ce qui signifie que seule la personne qui subit le préjudice et qui peut retirer un avantage de la procédure peut agir. Le ministère Public est seul habilité à défendre la société. Un particulier ne peut donc pas prétendre à défendre cet intérêt général ;
► l’intérêt à agir doit être légitime c’est-à-dire que le demandeur doit émettre une prétention qui n’est pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. Cette condition vise à écarter les actions illicites ou immorales ;
► l’intérêt à agir doit être actuel ce qui signifie négativement qu’il ne doit pas être qu’éventuel. Ce qui veut dire positivement que le préjudice subi doit être né, réalisé ;
À noter
Par exception, on peut demander au juge des référés qu’il prévienne un dommage imminent. Le préjudice n’est donc pas encore survenu à ce moment-là mais sa réalisation est certaine en cas d’inaction.
► l’intérêt à agir doit enfin être direct. Il faut entendre par là que le préjudice subi doit être directement causé par l’infraction portée à la connaissance du juge.
Par principe, la personne qui agit et qui a un intérêt personnel, né et actuel a qualité pour agir. Toutefois, par exception certaines personnes ont qualité pour agir pour autrui. Trois types d’intérêts, autres que l’intérêt personnel et direct, sont pris en compte par la loi pour habiliter une personne à agir en justice : l’intérêt général, l’intérêt collectif et l’intérêt pour autrui.
La qualité pour agir du ministère Public dans la défense de la société :
► la défense de l’intérêt général appartient à la société par l’intermédiaire de son représentant, le ministère Public. Ainsi, ce dernier intervient notamment en matière pénale mais peut aussi agir en procédure civile pour les affaires qui intéressent l’ordre public.
La qualité pour agir de certains groupements dans l’intérêt collectif :
► c’est notamment le cas des syndicats qui ont qualité pour agir pour défendre l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent pour des faits leur portant un préjudice direct ou indirect. De même, certaines associations sont habilitées par la loi pour défendre un intérêt collectif, notamment en matière de consommation ou d’environnement.
La qualité pour agir pour la défense d’un tiers déterminé :
Il existe trois types d’action de substitution :
- Les actions d’un groupement à la place d’une personne physique
Exemple
Le syndicat d’un salarié peut engager une action contre l’employeur du salarié à sa place s’il risque de perdre son travail ou de subir de nombreuses vexations. Néanmoins, le salarié demeure libre d’assurer lui-même, personnellement, l’exercice de l’action et d’y mettre fin.
- Les actions d’un membre d’un groupement à la place du groupement
Une telle substitution est permise lorsqu’un groupement n’exerce pas son action en justice alors qu’il a subi un préjudice.
Exemple
C’est souvent le cas lorsque c’est le dirigeant de la société qui a causé un préjudice à celle-ci en commettant un acte frauduleux. Normalement, c’est au dirigeant d’intenter une action en réparation du préjudice, au nom de la société, mais comme il est l’auteur du dommage, il ne le fera pas. C’est pourquoi, la loi habilite les associés ou les actionnaires de la société à agir au nom de la société afin de demander la réparation du préjudice subi par elle.
- Les actions d’une personne à la place d’une autre personne
C’est le cas lorsque la personne qui a subi personnellement le dommage est incapable d’agir en justice.
Exemple
L’enfant mineur qui a subi un préjudice ne peut pas intenter une action seul. Il doit nécessairement être représenté par son administrateur légal.
De même, si vous avez prêté de l’argent à une personne et que celle-ci est dans l’impossibilité de vous rembourser parce qu’elle refuse de réclamer à une tierce personne l’argent qu’elle lui doit, alors vous pouvez engager l’action en restitution des sommes dues à sa place.
Pour pouvoir intenter une action en justice, il faut être capable. En principe, tout citoyen dispose de cette capacité. Toutefois, certaines personnes sont dépourvues de la capacité d’agir en justice et doivent nécessairement se faire représenter ou assister si elles souhaitent intenter une action.
C’est le cas des mineurs non émancipés et des majeurs victimes d’une altération de leurs facultés mentales, placés sous tutelles ou curatelle. Ainsi, par exemple, l’administrateur légal agira au nom de l’enfant mineur non émancipé.
Par exception, certaines actions font l’objet de règles particulières permettant à ces personnes d’agir seules en justice comme c’est le cas de l’action en recherche de paternité qui peut être exercée par le parent, même mineur, à l’égard duquel la filiation a été établie.
L’action en justice n’est pas ouverte indéfiniment pour une raison simple de préservation de la paix sociale. Il existe donc des délais pour agir. Si aucun recours n’a lieu avant l’écoulement du délai de prescription, alors la situation va se consolider et l’acte ou le fait dommageable ne pourra plus être contesté en justice.
La prescription est le délai au-delà duquel vous ne pouvez plus agir. Même si vous avez raison, votre action ne sera plus recevable.
En matière civile, les délais de prescription varient selon la nature de l’action et son objet :
► les délais de prescription sont de 2 ans en matière commerciale pour les actions des professionnels pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs ;
► les délais de prescriptions sont de 5 ans pour les actions personnelles ou mobilières comme les actions en paiement des pensions alimentaires ou les actions par lesquelles une personne engage la responsabilité de son avocat qui a commis une faute dans l’exercice de ses fonctions en perdant un document important par exemple ;
► les délais de prescription sont de 10 ans pour l’action en responsabilité civile relative à un dommage corporel, pour les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs et leurs sous-traitant ou encore concernant les décisions de justice ;
► les délais de prescriptions sont de 30 ans pour les actions de nature immobilière.
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