Cour d'assises des mineurs : rappels procéduraux
La publicité restreinte imposée à la Cour d'assises des mineurs est une règle d'ordre public à laquelle il ne saurait être dérogé que dans les conditions prévues par l'article 306 du code de procédure pénale ; les circonstances aggravantes morales qui, par leur nature même, sont personnelles, doivent faire l'objet d'une question distincte pour chacun des co-accusés.
Dans cet arrêt du 20 juin 2012, la chambre criminelle rappelle deux règles de procédure criminelle, l'une propre à la Cour d'assises des mineurs, l'autre, plus générale, portant sur la nature des questions posées à la cour et au jury. Dans cette espèce, deux accusés, l'un mineur, l'autre majeur au moment des faits, avaient été condamnés pour vol avec arme, violences aggravées, recel de vol et dégradations volontaires, le premier à quatorze ans et le second à quinze ans de réclusion criminelle.
Le premier motif de censure a trait à la règle de la publicité restreinte applicable devant les juridictions pour mineurs. L'avocat de l'accusé majeur avait en effet sollicité et obtenu l'autorisation du Président pour qu'une amie de son client assiste aux débats. Or, les articles 14 et 20 (par renvoi) de l'ordonnance du 2 février 1945 prévoient que « seuls seront admis à assister aux débats la victime, qu'elle soit ou non constituée partie civile, les témoins de l'affaire, les proches parents, le tuteur ou le représentant légal du mineur, les membres du barreau, les représentants des sociétés de patronage et des services ou institutions s'occupant des enfants, les délégués à la liberté surveillée ». Il est, de surcroît, traditionnellement jugé que la publicité restreinte est une règle d'ordre public à laquelle il ne saurait, en aucun cas, être dérogé (Crim. 6 janv. 1993, Bull. crim. n° 10 ; RSC 1993. 781, obs. G. Levasseur ; ibid. 798, obs. A. Braunschweig ; 24 juin 1998, Bull. crim. n° 245). La haute juridiction en rappelle ici le principe, précisant toutefois, pour prendre en compte la modification introduite par la loi n° 2011-939 du 11 août 2011 qu'il n'en est autrement que dans les conditions prévues par l'article 306, derniers alinéas, du code de procédure pénale. Il résulte de cette nouvelle rédaction que la cour d'assises des mineurs peut, sur demande d'un des accusés ou du procureur de la République, décider que les débats auront lieu en audience publique, lorsque la personne poursuivie, mineure au moment des faits, est devenue majeure au moment des débats.
Le second motif de cassation est relatif aux modalités de rédaction des questions posées à la Cour d'assises et au jury. Les questions avaient en l'espèce été posées de la façon suivante : Question n° 8 (question principale) : « est-il constant que le 25 août 2006 à F… des violences ayant entraîné une incapacité totale temporaire supérieure à huit jours ont été exercées sur la personne de Juliette S… ? » Question n° 10 : « Les violences spécifiées à la question n° 8 ont-elles été commises avec préméditation ? ». Là encore, il existe une jurisprudence classique, bien établie, qui opère une distinction entre les circonstances aggravantes en fonction de leur caractère réel ou moral. L'attendu de principe, repris dans l'arrêt rapporté, énonce que « s'il est admis que les circonstances aggravantes matérielles peuvent légalement n'être l'objet que d'une seule question commune à tous les accusés d'un même crime ou délit, par ce motif qu'une fois établi à l'égard d'un seul, le fait matériel l'est à l'égard de tous, il en est autrement des circonstances aggravantes morales qui, par leur nature même, sont personnelles à chacun d'eux (par ex. Crim. 5 mars 1981, Bull. crim. n° 83 ; RSC 1982. 629, obs. J.-H. Robert). De la même façon il est habituellement jugé que la préméditation se range parmi les circonstances aggravantes morales et personnelles, qui, en cas de pluralité d'accusés, doit faire l'objet d'une question distincte posée pour chacun d'eux (Crim. 30 oct. 1996, Bull. crim. n° 384 ; 14 avr. 1999, n° 96-80.541, Bull. crim. n° 81 ; D. 1999. Somm. 323, obs. J. Pradel ; ibid. 2000. Somm. 26, obs. Y. Mayaud ; V. égal. Rép. pén., v° Meurtre, par Y. Mayaud). C'est donc sans surprise que l'arrêt de la Cour d'assises des mineurs du Vaucluse est cassé sur ces deux points.
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