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INTRODUCTION AU DROIT FRANÇAIS

INTRODUCTION AU DROIT FRANÇAIS

Par sa tradition, sa forme et sa méthode, le droit français fait partie des systèmes de droit civil (civil law) ou groupe romano-germanique. C’est un modèle dont beaucoup d’autres droits nationaux se sont inspirés. Pour comprendre le droit français d’aujourd’hui, il est bon d’en connaître un peu l’histoire, les sources et les structures.

§ 1 – L’histoire du droit français

§ 2 – Les sources du droit français

A – La loi

B – La jurisprudence

C – La coutume

D – La doctrine

§ 3 – Les grandes structures du droit français

A – La séparation du droit privé et du droit public

B – Les distinctions fondamentales en droit privé

§ 1 – L’histoire du droit français

Après la chute de l’Empire romain, la Gaule romaine a subi des invasions et des influences diverses. A partir du Xe siècle, les rois de France ont travaillé à unifier le pays et en ont fait un Etat fort et centralisé. Ils ne sont cependant pas arrivés à imposer un droit uniforme. Dans le sud, on appliquait le droit romain et dans le nord une multitude de coutumes parfois très diverses. Comme partout en Europe, le droit de l’Eglise (droit canonique) exerça une grande influence, en matière de mariage et de testament notamment. Les cours supérieures étaient les parlements des principales provinces. Le parlement de Paris n’avait pas de supériorité sur les autres et chaque parlement se reconnaissait la liberté d’accepter (enregistrer) ou non les lois (édits, ordonnances) passées par le roi.

Pendant la Révolution française et la période impériale, il fut décidé de mettre en œuvre le principe de séparation des pouvoirs. Le législateur crée la loi et le juge l’applique. En 1804, l’empereur Napoléon Ier fit adopter un Code civil, qui avait été préparé par quatre éminents juristes représentant les différentes traditions juridiques du nord et du sud de la France. Ce code réalise un double compromis :

  • entre le droit écrit et le droit coutumier, d’une part,
  • entre la société traditionnelle de l’Ancien Régime et la philosophie individualiste qui inspira la Révolution, d’autre part.

Les rédacteurs du Code civil ont choisi de ne pas donner à la loi un caractère trop détaillé. Les articles du Code civil contiennent beaucoup de règles générales et sont rédigés dans un style clair et assez peu technique. C’était un moyen de rendre le droit plus compréhensible pour les citoyens et de les protéger contre l’arbitraire des juges.

D’autres codes ont été rédigés pendant le Premier Empire : un code pénal, un code de commerce et deux codes pour la procédure, un pour la procédure civile et l’autre pour la procédure pénale. A la même époque, une nouvelle organisation judiciaire a été donnée à la France, avec au sommet de l’organisation une Cour de cassation, chargée de veiller à la bonne application de la loi et à l’unité de son interprétation.

§ 2 – Les sources du droit français

Les principales sources du droit français sont la loi, la jurisprudence, la coutume et la doctrine.

A – La loi

La loi écrite est la source principale. Il y a plusieurs sortes de textes et ils sont hiérarchisés. Au sommet, on trouve la constitution. Ensuite, il y a la loi votée par le Parlement et promulguée par le Président de la République. La constitution actuelle, adoptée en 1958, a diminué le pouvoir législatif du Parlement. Celui-ci ne légifère que dans les matières principales, dont la liste est donnée à l’article 34 de la constitution. Les autres matières sont de la compétence du gouvernement, qui fait des règlements (décrets). Ainsi, la procédure civile ne relève pas de la compétence législative du Parlement mais du pouvoir réglementaire du gouvernement. En bas de la hiérarchie, on trouve les arrêtés ministériels et les arrêtés faits par les autres autorités administratives, par exemple les préfets des départements et les maires des communes. Le Conseil d’Etat, juridiction suprême en matière administrative, contrôle la légalité des règlements.

Les codes, les lois et les décrets sont divisés en articles, et les articles sont divisés en alinéas. L’expression " art. 1384 al. 1 C. civ. " désigne l’article 1384 alinéa 1 du Code civil. Quand on ajoute des nouveaux articles dans le Code civil, on prend le numéro de l’article qui précède et on ajoute un tiret et un numéro (art. 334-1, art. 334-2, art. 334-3 etc.).

B – La jurisprudence

On appelle jurisprudence l’ensemble des décisions rendues par les cours et les tribunaux, qui sont appelées arrêts quand elles sont rendues par une cour, et jugements quand elles sont rendues par un tribunal. Dans l’ancien droit, la jurisprudence des parlements avait une grande importance. La Révolution a voulu limiter le pouvoir des juges, et leur décisions n’ont pas l’autorité d’un précédent. On dit officiellement que la jurisprudence n’est pas une source directe du droit. C’est une source indirecte. La jurisprudence interprète et complète la loi.

La réalité est différente. La loi étant générale, elle a souvent besoin d’être interprétée. En outre, il faut parfois la compléter. Pour cela, la Cour de cassation établit une jurisprudence qui est spontanément suivie par les juridictions inférieures (les juges du fond). Les juges du fond ne sont pas obligés de suivre la jurisprudence de la Cour de cassation, mais ils savent que s’ils ne la suivent pas, il y a de grandes chances que leur décision soit annulée (cassée) suite à un appel et à un pourvoi en cassation.

A partir du XXe siècle, la jurisprudence a pris l’habitude d’interpréter les textes de manière très extensive, en s’éloignant de la lettre de la loi et de la simple recherche de l’intention du législateur. Les juges n’hésitent pas à imposer de nouvelles doctrines, souvent inventées par les professeurs de droit, et qui ne correspondent pas à l’intention de ceux qui ont écrit les textes. Ils contribuent largement à l’évolution du droit.

Aussi, malgré la théorie qui dit qu’elle n’est pas une source officielle, une grande partie du droit français est créée par la jurisprudence.

C – La coutume

La coutume est constituée d’usage généraux et constants, que la population reconnaît comme obligatoires. Par exemple, le Code civil ne dit pas que la femme mariée a le droit ou le devoir de porter le nom de son mari. C’est une simple coutume.

La coutume était autrefois une source importante. Aujourd’hui, il reste quelques coutumes, en matière professionnelle et surtout commerciale. La coutume a un caractère obligatoire.

D – La doctrine

On appelle doctrine l’ensemble des écrits et des publications des juristes, qu’ils soient universitaires ou praticiens. La doctrine des auteurs avait une grande influence dans l’Ancien Droit. Aujourd’hui, on dit que la doctrine n’est pas une source directe, mais qu’elle influence indirectement la création du droit.

De nombreuses réformes législatives et réglementaires ont été préparées avec le concours des professeurs de droit. En outre, beaucoup de règles jurisprudentielles trouvent leur origine dans les travaux des auteurs. Mais comme officiellement, les juges et les auteurs ne peuvent pas créer le droit, on ne cite pas directement la jurisprudence et la doctrine dans les décisions de justice. On fait comme si le législateur était à l’origine de toutes les règles.

§ 3 – Les grandes structures du droit français

Il faut dire quelques mots de la séparation du droit public et du droit privé, avant de présenter quelques distinctions fondamentales en droit privé.

A – La séparation du droit privé et du droit public

La distinction du droit privé et du droit public a une grande importance en droit français. Alors que le droit privé s’intéresse aux relations entre les particuliers, le droit public régit l’organisation de l’Etat et les relations de l’Etat et des administrations publiques avec les particuliers. Les cours et tribunaux sont séparés en juridictions de l’ordre judiciaire et juridictions de l’ordre administratif. Les juridictions de l’ordre judiciaire ont compétence pour les litiges de droit privé, mais aussi en matière pénale. Les juridictions administratives statuent sur les recours pour excès de pouvoir (demande d’annulation de décisions ou règlements pour illégalité) et sur le contentieux ordinaire lorsque le défendeur est une administration publique.

Le droit privé est lui-même divisé en plusieurs branches. La branche principale est le droit civil, qui s’occupe des personnes, des biens et des obligations contractuelles et délictuelles. A côté, on trouve le droit commercial qui s’occupe des relations entre commerçants et des actes de commerce, le droit du travail qui régit les relations entre employeurs et salariés. Il y a des tribunaux particuliers pour le droit commercial (tribunaux de commerce) et pour le droit du travail (conseils de prud’hommes). Lorsqu’il n’existe pas de juridiction spécialisée, le litige est porté devant le tribunal d’instance, lorsqu’il est de faible importance, ou devant le tribunal de grande instance lorsque c’est un litige important. D’autres matières spécialisées existent, comme par exemple le droit rural, le droit de la sécurité sociale ou le droit de la consommation. Des codes spécialisés régissent ces différentes matières. Quand il n’y a pas de règle spéciale, on applique les règles générales du Code civil.

B – Les distinctions fondamentales en droit privé

Les droits individuels sont appelés droits subjectifs, car le droit les rattache à la personne, qui est sujet de droit. Les droits subjectifs se divisent en deux grandes catégories :

  • les droits patrimoniaux sont ceux que l’on peut évaluer en argent : ils ont une valeur économique ou pécuniaire ;
  • les droits extrapatrimoniaux qui ne sont pas susceptibles d’être évalués en argent : ils peuvent avoir une nature politique (droit de vote), familiale (autorité parentale et droit de garde sur les enfants), ou être liés à la personnalité. Dans ce dernier cas, on les appelle droits de la personnalité (droit à l’honneur, droit au nom, droit au respect de la vie privée).

On ne peut pas disposer des droits extrapatrimoniaux ni les perdre. On dit qu’ils sont indisponibles et imprescriptibles. En revanche, les droits patrimoniaux sont disponibles et prescriptibles. On dit souvent que ce sont des biens.

Les droits patrimoniaux se divisent en plusieurs catégories:

  • les droits réels, qui donnent à la personne un pouvoir juridique qui s’exerce directement sur une chose et qui peuvent être défendus contre tout le monde ; l’exemple le plus caractéristique est le droit de propriété;
  • les droits personnels ou de créance, qui sont des liens d’obligation par lesquels un créancier peut exiger quelque chose d’un débiteur, mais de personne d’autre ; il existe des obligations de donner, de faire et de ne pas faire;
  • les droits intellectuels, comme celui qu’un professionnel peut avoir sur sa clientèle, un auteur sur son œuvre littéraire ou artistique ou un inventeur sur son invention.

Les droits patrimoniaux font partie du patrimoine de la personne. En droit français, on dit que chaque personne a un patrimoine, constitué par l’ensemble de ses droits et obligations. Les droits sont regroupés dans l’actif du patrimoine, et le passif est constitué par les dettes que la personne peut avoir vis-à-vis des autres sujets de droit. Une personne physique ne peut avoir qu’un seul patrimoine. Si elle veut mettre des biens à l’abri de ses créanciers professionnels, elle peut créer une personne morale, par exemple une société civile ou commerciale.



23/08/2012
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