Les familles, otages des calculs politiciens
Le Point – Publié le 22/10/2014 à 07:07 – Modifié le 22/10/2014 à 20:37
Le débat parlementaire sur la modulation des allocations familiales a du mal à cacher les reniements, les lâchetés et les improvisations du pouvoir.
Mais dans les jours qui suivent, la politique politicienne reprend le dessus. Pour complaire aux frondeurs, le président change d’avis. Et les allocations familiales seront divisées par deux, ou par quatre, selon le niveau de revenu. Il n’a guère été récompensé de sa manoeuvre destinée à câliner le groupe socialiste à l’Assemblée nationale : 39 députés PS se sont abstenus, mardi 21 octobre, lors du vote du volet recettes du budget. Un record !
Si François Hollande a tant hésité à revenir sur l’universalité des « allocs », c’est sûrement moins par amour de la famille qu’en souvenir des déboires qu’avait connus son ex-mentor Lionel Jospin sur ce sujet. En 1997, celui-ci est Premier ministre quand il décide de plafonner les allocations familiales. Devant les protestations, il doit faire machine arrière au bout de dix mois. À la place, il rabote le quotient familial.
« Double peine » pour les familles « aisées »
Aujourd’hui, les familles « aisées », pour reprendre le vocable en vigueur, subissent la double peine. Le quotient familial s’appliquant aux revenus déclarés a été raboté deux années de suite, initialement pour maintenir l’universalité des allocations. C’est le président de la République en personne qui a expliqué ce choix en septembre 2013. Or, cette « double peine » – quotient raboté plus allocations divisées – ne touche pas les super-riches, contrairement à ce que veulent faire croire les discours gouvernementaux, mais des ménages qui gagnent, avec deux salaires, 6 000 euros par mois.
Est-il nécessaire de rappeler, par ailleurs, que la redistribution a déjà eu lieu en amont, puisque les cotisations sont proportionnelles au salaire ? Ceux qui cotisent plus ne recevaient donc pas plus. Désormais, ils devront prétendre à moins.
Une usine à gaz de plus
Tout à coup, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, a semblé découvrir un autre problème la veille du débat : les fameux « effets de seuil ». Exemple : un foyer fiscal dont les revenus atteignent 6 010 euros par mois se verra priver de la moitié de ses allocations familiales et sera pénalisé financièrement par rapport à celui dont les revenus plafonnent juste en dessous de 6 000 euros. La ministre propose donc un « lissage », avec effet de compensation, pour ces cas limites. Une invention bureaucratique dont les caisses d’allocations familiales se seraient bien passées.