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Saisine du CSM par les justiciables. La boite de Pandore est-elle ouverte ou fermée ?

 

 

Saisine du CSM par les justiciables. La boite de Pandore est-elle ouverte ou fermée ?

Publié le dans Juridictions et Barreaux.
Csm La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Vème République a modifié l’article 65 de la Constitution dans ses dispositions relatives à la composition et aux attributs du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). L’existence de la formation plénière du CSM est reconnue. Présidée par le premier président de la Cour de cassation, elle est composée de six magistrats, six personnalités extérieures, un conseiller d’État et un avocat. Les magistrats, comme dans les formations du siège et du parquet, sont donc minoritaires, ce qui constitue une situation unique en Europe.


Le premier président de la Cour de cassation et le procureur général président les formations respectives du siège et du parquet, non seulement, comme auparavant, en matière disciplinaire mais aussi pour les nominations. Si les procureurs généraux ne seront plus nommés en conseil des ministres mais après l’avis de la formation du parquet, comme pour tous les membres du ministère public, le pouvoir politique peut passer outre à un avis négatif comme il le fait pour les postes sensibles, en rupture avec la pratique antérieure de Pierre Méhaignerie, Elisabeth Guigou et Marylise Lebranchu.

Une disposition suscitait un réel intérêt, à savoir la compétence du CSM à se prononcer « sur les questions relatives à la déontologie, ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la justice ». Le politique a voulu empêcher l’auto-saisine du CSM sur ce dernier point, alors que celui-ci avait pourtant exercé cette prérogative de façon très – trop – modeste, en émettant un avis sur la création des juges de proximité en 2002, mais surtout en 2006 en critiquant le ministre de l’intérieur d’alors qui avait mis en cause le président du tribunal pour enfants de Bobigny et ses décisions.

La dernière disposition de la loi constitutionnelle était sans doute la plus porteuse de changement substantiel : « Le CSM peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique ». Toutes options étaient donc ouvertes. Mais le projet déposé le 10 juin 2009 sur le bureau du Sénat est décevant. Le texte adapte les dispositions relatives au fonctionnement du CSM et précise quelques éléments ponctuels en matière disciplinaire, comme la substitution du terme de « blâme » à celui de « réprimande ».

Pour le reste, le projet est essentiellement restrictif. Il restreint la saisine du justiciable à la seule question disciplinaire, selon une procédure très encadrée, énoncée dans l’article 18 pour les magistrats du siège et l’article 25 pour ceux du parquet. Le texte constitutionnel ouvrait pourtant à d’autres possibilités de saisine, non seulement de façon négative pour mettre en cause un magistrat, mais aussi de façon positive pour que le CSM assume pleinement sa place institutionnelle d’organe protecteur de l’indépendance des juges, garantie fondamentale pour le justiciable. Le CSM avait joué ce rôle, en période de cohabitation, sur saisine du président de la République François Mitterrand, pour conforter le juge d’instruction Halphen que le ministre de l’intérieur avait tenté de déstabiliser par la mise en cause de son beau-père.

La saisine directe du CSM par le justiciable en matière disciplinaire est à la fois large quant au champ des comportements visés, et limitée par la complexité du parcours procédural mis en place. Le projet veut éviter la contestation des décisions des magistrats autrement que par l’exercice des voies de recours, ainsi qu’un risque de déstabilisation des magistrats à travers une stratégie de dénonciation ayant pour finalité le dessaisissement du juge que l’on redoute.

Le champ disciplinaire visé concerne « le comportement d’un magistrat dans l’exercice de ses fonctions ». Il n’y a donc pas d’immunité absolue de l’acte juridictionnel, et le Conseil constitutionnel, le 1er mars 2007, a précisé le contenu de la faute disciplinaire dans ce cadre : « Une violation grave et délibérée d’une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties ».

Le mode de saisine du CSM est très encadré. A peine d’irrecevabilité, la plainte ne peut être transmise tant que le magistrat est saisi – siège – ou en charge du dossier – parquet –. Elle ne peut être présentée que dans une fenêtre de six mois après la décision définitive mettant fin à la procédure. Il en résulte une différence flagrante entre les juges statuant ponctuellement sur une affaire et ceux gérant des situations sur la durée comme les juges des enfants ou les juges des tutelles.

Les conditions de forme sont rigoureuses : bien entendu, le refus des plaintes anonymes, mais aussi l’obligation d’indication détaillée des faits et griefs allégués. Il s’agit d’éviter les multiples demandes d’explications aux magistrats. Un système de filtrage est prévu par une section de la formation compétente du CSM, deux magistrats et deux personnalités extérieures, qui décideront de la saisine du CSM lorsque les faits seront susceptibles de constituer une faute de nature disciplinaire. Cette saisine est automatique en cas de partage des voix, pour éviter tout blocage des professionnels. Le président peut rejeter toute plainte manifestement infondée. Le garde des Sceaux et les chefs de cour d’appel, à partir des faits dont ils ont connaissance, peuvent aussi exercer leur pouvoir de saisine directe du CSM. Le justiciable encourt des poursuites pour dénonciation calomnieuse s’il transmet au CSM des faits qu’il savait partiellement ou totalement inexacts.

Mise en œuvre technique d’un objectif politique, mais voulant prévenir les risques qu’il fait courir à l’institution judiciaire, le projet de loi organique entend répondre à deux injonctions contradictoires : ouvrir une boite de Pandore, tout en tentant de la garder la plus possible fermée. Il serait étonnant que le parlement après Outreau ne modifie pas ce texte, dans un climat anti-magistrats qui ne laisse rien préjuger de très positif.

Jean-Paul Jean
Avocat général près la cour d’appel de Paris, professeur associé à l’Université de Poitiers

 

 

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La loi

 

LOI constitutionnelle no 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation

des institutions de la Ve République (1)

NOR : JUSX0807076L

Le Congrès a adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article 1er

I. – L’article 1er de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi

qu’aux responsabilités professionnelles et sociales. »

II. – Le dernier alinéa de l’article 3 de la Constitution est supprimé.

Article 2

L’article 4 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans le second alinéa, les mots : « au dernier alinéa de l’article 3 » sont remplacés par les mots : « au

second alinéa de l’article 1er » ;

2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et

groupements politiques à la vie démocratique de la Nation. »

Article 3

Après le premier alinéa de l’article 6 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. »

Article 4

L’article 11 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans le premier alinéa, les mots : « ou sociale » sont remplacés par les mots : « , sociale ou

environnementale » ;

2o Après le deuxième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa peut être organisé à l’initiative d’un

cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales.

Cette initiative prend la forme d’une proposition de loi et ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une

disposition législative promulguée depuis moins d’un an.

« Les conditions de sa présentation et celles dans lesquelles le Conseil constitutionnel contrôle le respect des

dispositions de l’alinéa précédent sont déterminées par une loi organique.

« Si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi

organique, le Président de la République la soumet au référendum.

« Lorsque la proposition de loi n’est pas adoptée par le peuple français, aucune nouvelle proposition de

référendum portant sur le même sujet ne peut être présentée avant l’expiration d’un délai de deux ans suivant

la date du scrutin. » ;

3o Dans le dernier alinéa, après le mot : « projet », sont insérés les mots : « ou de la proposition ».

Article 5

L’article 13 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa,

pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et

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sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s’exerce après avis public de la

commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à

une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois

cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions

permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés. »

Article 6

L’article 16 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Après trente jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le

Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins

d’examiner si les conditions énoncées au premier alinéa demeurent réunies. Il se prononce dans les délais les

plus brefs par un avis public. Il procède de plein droit à cet examen et se prononce dans les mêmes conditions

au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée. »

Article 7

L’article 17 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 17. − Le Président de la République a le droit de faire grâce à titre individuel. »

Article 8

L’article 18 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut prendre la parole devant le Parlement réuni à cet effet en Congrès. Sa déclaration peut donner lieu,

hors sa présence, à un débat qui ne fait l’objet d’aucun vote. » ;

2o Dans le dernier alinéa, les mots : « le Parlement est réuni » sont remplacés par les mots : « les assemblées

parlementaires sont réunies ».

Article 9

L’article 24 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 24. − Le Parlement vote la loi. Il contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques

publiques.

« Il comprend l’Assemblée nationale et le Sénat.

« Les députés à l’Assemblée nationale, dont le nombre ne peut excéder cinq cent soixante-dix-sept, sont élus

au suffrage direct.

« Le Sénat, dont le nombre de membres ne peut excéder trois cent quarante-huit, est élu au suffrage indirect.

Il assure la représentation des collectivités territoriales de la République.

« Les Français établis hors de France sont représentés à l’Assemblée nationale et au Sénat. »

Article 10

L’article 25 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou leur remplacement temporaire en cas d’acceptation

par eux de fonctions gouvernementales » ;

2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Une commission indépendante, dont la loi fixe la composition et les règles d’organisation et de

fonctionnement, se prononce par un avis public sur les projets de texte et propositions de loi délimitant les

circonscriptions pour l’élection des députés ou modifiant la répartition des sièges de députés ou de sénateurs. »

Article 11

L’article 34 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Le premier alinéa est supprimé ;

2o Dans le troisième alinéa, après les mots : « libertés publiques ; », sont insérés les mots : « la liberté, le

pluralisme et l’indépendance des médias ; »

3o Après les mots : « assemblées parlementaires », la fin du huitième alinéa est ainsi rédigée : « , des

assemblées locales et des instances représentatives des Français établis hors de France ainsi que les conditions

d’exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des

collectivités territoriales ; »

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4o L’avant-dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Des lois de programmation déterminent les objectifs de l’action de l’État.

« Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles

s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques. »

Article 12

Après l’article 34 de la Constitution, il est inséré un article 34-1 ainsi rédigé :

« Art. 34-1. − Les assemblées peuvent voter des résolutions dans les conditions fixées par la loi organique.

« Sont irrecevables et ne peuvent être inscrites à l’ordre du jour les propositions de résolution dont le

Gouvernement estime que leur adoption ou leur rejet serait de nature à mettre en cause sa responsabilité ou

qu’elles contiennent des injonctions à son égard. »

Article 13

L’article 35 de la Constitution est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le Gouvernement informe le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l’étranger, au

plus tard trois jours après le début de l’intervention. Il précise les objectifs poursuivis. Cette information peut

donner lieu à un débat qui n’est suivi d’aucun vote.

« Lorsque la durée de l’intervention excède quatre mois, le Gouvernement soumet sa prolongation à

l’autorisation du Parlement. Il peut demander à l’Assemblée nationale de décider en dernier ressort.

« Si le Parlement n’est pas en session à l’expiration du délai de quatre mois, il se prononce à l’ouverture de

la session suivante. »

Article 14

Le deuxième alinéa de l’article 38 de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse. »

Article 15

L’article 39 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans la dernière phrase du dernier alinéa, les mots : « et les projets de loi relatifs aux instances

représentatives des Français établis hors de France » sont supprimés ;

2o Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« La présentation des projets de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions

fixées par une loi organique.

« Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l’ordre du jour si la Conférence des présidents de la première

assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre

la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre

peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours.

« Dans les conditions prévues par la loi, le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil

d’État, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l’un des membres de cette

assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose. »

Article 16

Dans le premier alinéa de l’article 41 de la Constitution, après les mots : « le Gouvernement », sont insérés

les mots : « ou le président de l’assemblée saisie ».

Article 17

L’article 42 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 42. − La discussion des projets et des propositions de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la

commission saisie en application de l’article 43 ou, à défaut, sur le texte dont l’assemblée a été saisie.

« Toutefois, la discussion en séance des projets de révision constitutionnelle, des projets de loi de finances et

des projets de loi de financement de la sécurité sociale porte, en première lecture devant la première assemblée

saisie, sur le texte présenté par le Gouvernement et, pour les autres lectures, sur le texte transmis par l’autre

assemblée.

« La discussion en séance, en première lecture, d’un projet ou d’une proposition de loi ne peut intervenir,

devant la première assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de six semaines après son dépôt. Elle ne peut

intervenir, devant la seconde assemblée saisie, qu’à l’expiration d’un délai de quatre semaines à compter de sa

transmission.

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« L’alinéa précédent ne s’applique pas si la procédure accélérée a été engagée dans les conditions prévues à

l’article 45. Il ne s’applique pas non plus aux projets de loi de finances, aux projets de loi de financement de la

sécurité sociale et aux projets relatifs aux états de crise. »

Article 18

L’article 43 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 43. − Les projets et propositions de loi sont envoyés pour examen à l’une des commissions

permanentes dont le nombre est limité à huit dans chaque assemblée.

« À la demande du Gouvernement ou de l’assemblée qui en est saisie, les projets ou propositions de loi sont

envoyés pour examen à une commission spécialement désignée à cet effet. »

Article 19

Le premier alinéa de l’article 44 de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce droit s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des

assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique. »

Article 20

L’article 45 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Sans préjudice de l’application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès

lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis. » ;

2o Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Les mots : « déclaré l’urgence » sont remplacés par les mots : « décidé d’engager la procédure accélérée

sans que les Conférences des présidents s’y soient conjointement opposées » ;

b) Après le mot : « ministre », le mot : « a » est remplacé par les mots : « ou, pour une proposition de loi,

les présidents des deux assemblées agissant conjointement, ont ».

Article 21

Le deuxième alinéa de l’article 46 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Le projet ou la proposition ne peut, en première lecture, être soumis à la délibération et au vote des

assemblées qu’à l’expiration des délais fixés au troisième alinéa de l’article 42. Toutefois, si la procédure

accélérée a été engagée dans les conditions prévues à l’article 45, le projet ou la proposition ne peut être

soumis à la délibération de la première assemblée saisie avant l’expiration d’un délai de quinze jours après son

dépôt. »

Article 22

I. – Le dernier alinéa des articles 47 et 47-1 de la Constitution est supprimé.

II. – Après l’article 47-1 de la Constitution, il est inséré un article 47-2 ainsi rédigé :

« Art. 47-2. − La Cour des comptes assiste le Parlement dans le contrôle de l’action du Gouvernement. Elle

assiste le Parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application

des lois de financement de la sécurité sociale ainsi que dans l’évaluation des politiques publiques. Par ses

rapports publics, elle contribue à l’information des citoyens.

« Les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du

résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière. »

Article 23

L’article 48 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 48. − Sans préjudice de l’application des trois derniers alinéas de l’article 28, l’ordre du jour est fixé

par chaque assemblée.

« Deux semaines de séance sur quatre sont réservées par priorité, et dans l’ordre que le Gouvernement a fixé,

à l’examen des textes et aux débats dont il demande l’inscription à l’ordre du jour.

« En outre, l’examen des projets de loi de finances, des projets de loi de financement de la sécurité sociale

et, sous réserve des dispositions de l’alinéa suivant, des textes transmis par l’autre assemblée depuis six

semaines au moins, des projets relatifs aux états de crise et des demandes d’autorisation visées à l’article 35

est, à la demande du Gouvernement, inscrit à l’ordre du jour par priorité.

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« Une semaine de séance sur quatre est réservée par priorité et dans l’ordre fixé par chaque assemblée au

contrôle de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques.

« Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour arrêté par chaque assemblée à l’initiative des

groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’à celle des groupes minoritaires.

« Une séance par semaine au moins, y compris pendant les sessions extraordinaires prévues à l’article 29, est

réservée par priorité aux questions des membres du Parlement et aux réponses du Gouvernement. »

Article 24

Le troisième alinéa de l’article 49 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans la première phrase, le mot : « texte » est remplacé par les mots : « projet de loi de finances ou de

financement de la sécurité sociale » ;

2o Dans la deuxième phrase, le mot : « texte » est remplacé par le mot : « projet » ;

3o Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :

« Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de

loi par session. »

Article 25

Après l’article 50 de la Constitution, il est inséré un article 50-1 ainsi rédigé :

« Art. 50-1. − Devant l’une ou l’autre des assemblées, le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la

demande d’un groupe parlementaire au sens de l’article 51-1, faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui

donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité. »

Article 26

Après l’article 51 de la Constitution, il est inséré deux articles 51-1 et 51-2 ainsi rédigés :

« Art. 51-1. − Le règlement de chaque assemblée détermine les droits des groupes parlementaires constitués

en son sein. Il reconnaît des droits spécifiques aux groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’aux

groupes minoritaires.

« Art. 51-2. − Pour l’exercice des missions de contrôle et d’évaluation définies au premier alinéa de

l’article 24, des commissions d’enquête peuvent être créées au sein de chaque assemblée pour recueillir, dans

les conditions prévues par la loi, des éléments d’information.

« La loi détermine leurs règles d’organisation et de fonctionnement. Leurs conditions de création sont fixées

par le règlement de chaque assemblée. »

Article 27

Le premier alinéa de l’article 56 de la Constitution est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« La procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13 est applicable à ces nominations. Les nominations

effectuées par le président de chaque assemblée sont soumises au seul avis de la commission permanente

compétente de l’assemblée concernée. »

Article 28

Dans le premier alinéa de l’article 61 de la Constitution, après le mot : « promulgation, », sont insérés les

mots : « les propositions de loi mentionnées à l’article 11 avant qu’elles ne soient soumises au référendum, ».

Article 29

Après l’article 61 de la Constitution, il est inséré un article 61-1 ainsi rédigé :

« Art. 61-1. − Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une

disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel

peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans

un délai déterminé.

« Une loi organique détermine les conditions d’application du présent article. »

Article 30

Le premier alinéa de l’article 62 de la Constitution est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61 ne peut être promulguée ni

mise en application.

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« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la

publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le

Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a

produits sont susceptibles d’être remis en cause. »

Article 31

L’article 65 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 65. − Le Conseil supérieur de la magistrature comprend une formation compétente à l’égard des

magistrats du siège et une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet.

« La formation compétente à l’égard des magistrats du siège est présidée par le premier président de la Cour

de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du siège et un magistrat du parquet, un conseiller d’État

désigné par le Conseil d’État, un avocat ainsi que six personnalités qualifiées qui n’appartiennent ni au

Parlement, ni à l’ordre judiciaire, ni à l’ordre administratif. Le Président de la République, le Président de

l’Assemblée nationale et le Président du Sénat désignent chacun deux personnalités qualifiées. La procédure

prévue au dernier alinéa de l’article 13 est applicable aux nominations des personnalités qualifiées. Les

nominations effectuées par le président de chaque assemblée du Parlement sont soumises au seul avis de la

commission permanente compétente de l’assemblée intéressée.

« La formation compétente à l’égard des magistrats du parquet est présidée par le procureur général près la

Cour de cassation. Elle comprend, en outre, cinq magistrats du parquet et un magistrat du siège, ainsi que le

conseiller d’État, l’avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés au deuxième alinéa.

« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège fait des

propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, pour celles de premier

président de cour d’appel et pour celles de président de tribunal de grande instance. Les autres magistrats du

siège sont nommés sur son avis conforme.

« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet donne

son avis sur les nominations qui concernent les magistrats du parquet.

« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du siège statue

comme conseil de discipline des magistrats du siège. Elle comprend alors, outre les membres visés au

deuxième alinéa, le magistrat du siège appartenant à la formation compétente à l’égard des magistrats du

parquet.

« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet donne

son avis sur les sanctions disciplinaires qui les concernent. Elle comprend alors, outre les membres visés au

troisième alinéa, le magistrat du parquet appartenant à la formation compétente à l’égard des magistrats du

siège.

« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis

formulées par le Président de la République au titre de l’article 64. Il se prononce, dans la même formation, sur

les questions relatives à la déontologie des magistrats ainsi que sur toute question relative au fonctionnement de

la justice dont le saisit le ministre de la justice. La formation plénière comprend trois des cinq magistrats du

siège mentionnés au deuxième alinéa, trois des cinq magistrats du parquet mentionnés au troisième alinéa, ainsi

que le conseiller d’État, l’avocat et les six personnalités qualifiées mentionnés au deuxième alinéa. Elle est

présidée par le premier président de la Cour de cassation, que peut suppléer le procureur général près cette

cour.

« Sauf en matière disciplinaire, le ministre de la justice peut participer aux séances des formations du

Conseil supérieur de la magistrature.

« Le Conseil supérieur de la magistrature peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une

loi organique.

« La loi organique détermine les conditions d’application du présent article. »

Article 32

L’intitulé du titre XI de la Constitution est ainsi rédigé : « Le Conseil économique, social et

environnemental ».

Article 33

L’article 69 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans les premier et deuxième alinéas, les mots : « Conseil économique et social » sont remplacés par les

mots : « Conseil économique, social et environnemental » ;

2o Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le Conseil économique, social et environnemental peut être saisi par voie de pétition dans les conditions

fixées par une loi organique. Après examen de la pétition, il fait connaître au Gouvernement et au Parlement

les suites qu’il propose d’y donner. »

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Article 34

L’article 70 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 70. − Le Conseil économique, social et environnemental peut être consulté par le Gouvernement et le

Parlement sur tout problème de caractère économique, social ou environnemental. Le Gouvernement peut

également le consulter sur les projets de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des

finances publiques. Tout plan ou tout projet de loi de programmation à caractère économique, social ou

environnemental lui est soumis pour avis. »

Article 35

Dans l’article 71 de la Constitution, les mots : « Conseil économique et social » sont remplacés par les mots :

« Conseil économique, social et environnemental ».

Article 36

Dans l’article 71 de la Constitution, après le mot : « social », sont insérés les mots : « , dont le nombre de

membres ne peut excéder deux cent trente-trois, ».

Article 37

L’article 72-3 de la Constitution est ainsi modifié :

1o Dans le deuxième alinéa, après le mot : « Mayotte, », sont insérés les mots : « Saint-Barthélemy, Saint-

Martin, » ;

2o Le dernier alinéa est complété par les mots : « et de Clipperton ».

Article 38

L’article 73 de la Constitution est ainsi modifié :

1o À la fin du deuxième alinéa, les mots : « par la loi » sont remplacés par les mots : « , selon le cas, par la

loi ou par le règlement » ;

2o Dans le troisième alinéa, les mots : « par la loi » sont remplacés par les mots : « , selon le cas, par la loi

ou par le règlement, » et, après les mots : « de la loi », sont ajoutés les mots : « ou du règlement ».

Article 39

Le premier alinéa de l’article 74-1 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Dans les collectivités d’outre-mer visées à l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie, le Gouvernement peut,

par ordonnances, dans les matières qui demeurent de la compétence de l’État, étendre, avec les adaptations

nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou adapter les dispositions de nature

législative en vigueur à l’organisation particulière de la collectivité concernée, sous réserve que la loi n’ait pas

expressément exclu, pour les dispositions en cause, le recours à cette procédure. »

Article 40

Après l’article 75 de la Constitution, il est inséré un article 75-1 ainsi rédigé :

« Art. 75-1. − Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. »

Article 41

Après le titre XI de la Constitution, il est inséré un titre XI bis ainsi rédigé :

« TITRE XI BIS

« LE DÉFENSEUR DES DROITS

« Art. 71-1. − Le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés par les administrations de

l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics, ainsi que par tout organisme investi d’une

mission de service public, ou à l’égard duquel la loi organique lui attribue des compétences.

« Il peut être saisi, dans les conditions prévues par la loi organique, par toute personne s’estimant lésée par

le fonctionnement d’un service public ou d’un organisme visé au premier alinéa. Il peut se saisir d’office.

« La loi organique définit les attributions et les modalités d’intervention du Défenseur des droits. Elle

détermine les conditions dans lesquelles il peut être assisté par un collège pour l’exercice de certaines de ses

attributions.

24 juillet 2008 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 2 sur 149

. .

« Le Défenseur des droits est nommé par le Président de la République pour un mandat de six ans non

renouvelable, après application de la procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13. Ses fonctions sont

incompatibles avec celles de membre du Gouvernement et de membre du Parlement. Les autres

incompatibilités sont fixées par la loi organique.

« Le Défenseur des droits rend compte de son activité au Président de la République et au Parlement. »

Article 42

I. – Dans le titre XIV de la Constitution, il est rétabli un article 87 ainsi rédigé :

« Art. 87. − La République participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les États

et les peuples ayant le français en partage. »

II. – L’intitulé du titre XIV de la Constitution est ainsi rédigé : « De la francophonie et des accords

d’association ».

Article 43

L’article 88-4 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 88-4. − Le Gouvernement soumet à l’Assemblée nationale et au Sénat, dès leur transmission au

Conseil de l’Union européenne, les projets ou propositions d’actes des Communautés européennes et de

l’Union européenne.

« Selon des modalités fixées par le règlement de chaque assemblée, des résolutions européennes peuvent être

adoptées, le cas échéant en dehors des sessions, sur les projets ou propositions mentionnés au premier alinéa,

ainsi que sur tout document émanant d’une institution de l’Union européenne.

« Au sein de chaque assemblée parlementaire est instituée une commission chargée des affaires

européennes. »

Article 44

L’article 88-5 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 88-5. − Tout projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union

européenne et aux Communautés européennes est soumis au référendum par le Président de la République.

« Toutefois, par le vote d’une motion adoptée en termes identiques par chaque assemblée à la majorité des

trois cinquièmes, le Parlement peut autoriser l’adoption du projet de loi selon la procédure prévue au troisième

alinéa de l’article 89. »

Article 45

Dans la première phrase du deuxième alinéa de l’article 89 de la Constitution, après le mot : « être », sont

insérés les mots : « examiné dans les conditions de délai fixées au troisième alinéa de l’article 42 et ».

Article 46

I. – Les articles 11, 13, le dernier alinéa de l’article 25, les articles 34-1, 39, 44, 56, 61-1, 65, 69, 71-1 et 73

de la Constitution, dans leur rédaction résultant de la présente loi constitutionnelle, entrent en vigueur dans les

conditions fixées par les lois et lois organiques nécessaires à leur application.

II. – Les articles 41, 42, 43, 45, 46, 48, 49, 50-1, 51-1 et 51-2 de la Constitution, dans leur rédaction

résultant de la présente loi constitutionnelle, entrent en vigueur le 1er mars 2009.

III. – Les dispositions de l’article 25 de la Constitution relatives au caractère temporaire du remplacement

des députés et sénateurs acceptant des fonctions gouvernementales, dans leur rédaction résultant de la présente

loi constitutionnelle, s’appliquent aux députés et sénateurs ayant accepté de telles fonctions antérieurement à la

date d’entrée en vigueur de la loi organique prévue à cet article si, à cette même date, ils exercent encore ces

fonctions et que le mandat parlementaire pour lequel ils avaient été élus n’est pas encore expiré.

Article 47

I. – À compter de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le

traité instituant la Communauté européenne, signé le 13 décembre 2007, le titre XV de la Constitution est ainsi

modifié :

1o Dans le premier alinéa de l’article 88-4, les mots : « les projets ou propositions d’actes des Communautés

européennes et de l’Union européenne » sont remplacés par les mots : « les projets d’actes législatifs européens

et les autres projets ou propositions d’actes de l’Union européenne » ;

2o Dans l’article 88-5, les mots : « et aux Communautés européennes » sont supprimés ;

3o Les deux derniers alinéas de l’article 88-6 sont ainsi rédigés :

« Chaque assemblée peut former un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne contre un acte

législatif européen pour violation du principe de subsidiarité. Ce recours est transmis à la Cour de justice de

l’Union européenne par le Gouvernement.

24 juillet 2008 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 2 sur 149

. .

« À cette fin, des résolutions peuvent être adoptées, le cas échéant en dehors des sessions, selon des

modalités d’initiative et de discussion fixées par le règlement de chaque assemblée. À la demande de soixante

députés ou de soixante sénateurs, le recours est de droit. »

II. – Sont abrogés l’article 4 de la loi constitutionnelle no 2005-204 du 1er mars 2005 modifiant le titre XV

de la Constitution ainsi que les 3o et 4o de l’article 2 de la loi constitutionnelle no 2008-103 du 4 février 2008

modifiant le titre XV de la Constitution.

III. – L’article 88-5 de la Constitution, dans sa rédaction résultant tant de l’article 44 de la présente loi

constitutionnelle que du 2o du I du présent article, n’est pas applicable aux adhésions faisant suite à une

conférence intergouvernementale dont la convocation a été décidée par le Conseil européen avant le

1er juillet 2004.

La présente loi sera exécutée comme loi de l’État.

Fait à Paris, le 23 juillet 2008.

NICOLAS SARKOZY

Par le Président de la République :

Le Premier ministre,

FRANÇOIS FILLON

La garde des sceaux, ministre de la justice,

RACHIDA DATI

Le secrétaire d’Etat

chargé des relations avec le Parlement,

ROGER KAROUTCHI

(1) Travaux préparatoires : loi constitutionnelle no 2008-724.

Assemblée nationale :

Projet de loi constitutionnelle no 820 ;

Rapport de M. Jean-Luc Warsmann, au nom de la commission des lois, no 892 ;

Avis de M. Benoist Apparu, au nom de la commission des affaires culturelles, no 881 ;

Avis de M. Guy Teissier, au nom de la commission de la défense, no 883 ;

Avis de M. Axel Poniatowski, au nom de la commission des affaires étrangères, no 890 ;

Discussion les 20 à 22 et 26 à 29 mai 2008 et adoption le 3 juin 2008 (TA no 150).

Sénat :

Projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, no 365 (2007-2008) ;

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, au nom de la commission des lois, no 387 (2007-2008) ;

Avis de M. Josselin de Rohan, au nom de la commission des affaires étrangères, no 388 (2007-2008) ;

Discussion les 17 à 20, 23 et 24 juin 2008 et adoption le 24 juin 2008 (TA no 116).

Assemblée nationale :

Projet de loi constitutionnelle, modifié par le Sénat, no 993 ;

Rapport de M. Jean-Luc Warsmann, au nom de la commission des lois, no 1009 ;

Discussion les 8 et 9 juillet 2008 et adoption le 9 juillet 2008 (TA no 172).

Sénat :

Projet de loi constitutionnelle, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, no 459

(2007-2008) ;

Rapport de M. Jean-Jacques Hyest, au nom de la commission des lois, no 463 (2007-2008) ;

Discussion les 15 et 16 juillet 2008 et adoption le 16 juillet 2008 (TA no 137).

Congrès du Parlement :

Décret du Président de la République en date du 17 juillet 2008 tendant à soumettre un projet de loi constitutionnelle au

Parlement réuni en Congrès - Adoption le 21 juillet 2008.

 

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N° 460

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juin 2009

PROJET DE LOI ORGANIQUE

relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution,

PRÉSENTÉ

au nom de M. François FILLON,

Premier ministre

Par Mme Rachida DATI,

garde des Sceaux, ministre de la justice

(Renvoyé à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et

d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions

prévues par le Règlement.)

– 2 –

– 3 –

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi organique met en application le nouvel

article 65 de la Constitution, qui a été réécrit par la loi constitutionnelle

n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la

Ve République. Cet article renvoie à une loi organique le soin de

déterminer ses conditions d’application.

Pour fixer ces conditions, le présent projet modifie la loi organique

n° 94-100 du 5 février 1994 modifiée sur le Conseil supérieur de la

magistrature et l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée

portant loi organique relative au statut de la magistrature.

Il comprend également des dispositions complémentaires actualisant

les dispositions organiques relatives au Conseil supérieur de la magistrature

et adaptant le droit disciplinaire applicable aux magistrats.

Le chapitre Ier modifie la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994

sur le Conseil supérieur de la magistrature.

La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 précitée a modifié la

composition et les attributions du Conseil supérieur de la magistrature, de

sorte que diverses dispositions relatives au fonctionnement du Conseil

doivent être adaptées.

L’article 65 de la Constitution prévoit désormais expressément

l’existence et les attributions de la formation plénière du Conseil supérieur

de la magistrature. L’article 1er du présent projet insère un article 4-1 dans

la loi organique du 5 février 1994 précitée qui détermine le mode de

désignation des trois magistrats du siège et des trois magistrats du parquet

membres de la formation plénière. Ainsi, outre son président, cette

formation comprend, d’une part, pour toute la durée de leur mandat, les

deux magistrats du siège et les deux magistrats du parquet des cours et

tribunaux membres respectivement de la formation compétente à l’égard

des magistrats du siège et de la formation compétente à l’égard des

magistrats du parquet ; d’autre part, le premier président de cour d’appel ou

le président de tribunal de grande instance membres de la formation

compétente à l’égard des magistrats du siège - chacun successivement

pendant deux ans - et le procureur de la République près un tribunal de

grande instance ou le procureur général près une cour d’appel membres de

– 4 –

la formation compétente à l’égard des magistrats du parquet, chacun

successivement pendant deux ans.

Parallèlement, un nouvel article 20-2 de la loi organique du

5 février 1994 précitée, créé par l’article 12 du présent projet, fixe les

conditions et les matières dans lesquelles la formation plénière est

compétente, en conformité avec les dispositions de l’article 65 de la

Constitution. Ainsi, il lui appartient d’élaborer et de rendre public le

Recueil des obligations déontologiques des magistrats, mission confiée au

Conseil supérieur par la loi organique 2007-287 du 5 mars 2007 relative au

recrutement, à la formation et la responsabilité des magistrats et introduite

au dernier alinéa de l’article 20 de la loi organique du 5 février 1994

précitée, cette disposition étant corrélativement abrogée.

Il est désormais fait référence, dans l’article 5 de la loi organique du

5 février 1994 précitée, aux trois formations du Conseil supérieur, au lieu

des deux existant avant l’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle

(article 2).

Un nouvel article 5-1 de la loi organique du 5 février 1994 prévoit le

mode de désignation de l’avocat membre du Conseil supérieur (article 3).

Celui-ci est désigné par le président du Conseil national des barreaux, après

avis de l’assemblée générale dudit conseil, lequel, aux termes de

l’article 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de

certaines professions judiciaires et juridiques, est « chargé de représenter la

profession d’avocat notamment auprès des pouvoirs publics. » L’article 4

tire les conséquences de l’introduction d’un avocat dans la composition du

Conseil supérieur, en posant, à l’article 6 de la loi organique du

5 février 1994 précitée, une exception à l’interdiction faite aux membres du

Conseil supérieur d’exercer la profession d’avocat, uniquement pour le

membre désigné en cette qualité en application du deuxième alinéa de

l’article 65 de la Constitution. Il appartiendra à l’intéressé de s’abstenir de

siéger s’il estime, dans tel cas particulier, qu’en raison d’actes accomplis

dans le cadre de sa profession sa participation peut apparaître comme de

nature à porter atteinte à l’impartialité des débats.

L’article 3 du présent projet insère, par ailleurs, un article 5-2 dans la

loi organique du 5 février 1994 précitée, qui détermine, en application du

deuxième alinéa de l’article 65 de la Constitution et du dernier alinéa de

l’article 13 de la Constitution, la commission permanente compétente pour

rendre un avis sur la nomination des personnalités qualifiées membres du

Conseil supérieur. Il s’agit de la commission compétente en matière

d’organisation judiciaire de chaque assemblée.

– 5 –

L’article 7 de la loi organique du 5 février 1994 précitée prévoit

actuellement les modalités de remplacement des magistrats membres du

Conseil supérieur lorsqu’une vacance se produit avant l’expiration de la

date normale de leur mandat. Rien n’est prévu pour les autres membres du

Conseil supérieur. L’article 5 insère donc, dans cet article, un alinéa

prévoyant qu’en cas de vacance, ces membres sont remplacés selon les

modalités prévues pour leur désignation initiale.

L’article 6 du présent projet a pour objet de mettre en conformité

l’article 8 de la loi organique du 5 février 1994 avec les termes employés

dans l’ordonnance statutaire. Le premier alinéa, qui dispose actuellement

que « les magistrats membres du Conseil supérieur ne peuvent faire l’objet

ni d’une promotion de grade ni d’une mutation pendant la durée de leur

mandat. », précise désormais que « les magistrats membres du Conseil

supérieur ne peuvent faire l’objet ni d’un avancement de grade, ni d’une

promotion à une fonction hors hiérarchie, ni d’une nomination à un autre

emploi pendant la durée de leur mandat. »

La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 précitée a établi que le

Président de la République cesse de présider le Conseil supérieur de la

magistrature. Le garde des Sceaux, ministre de la justice, perd sa qualité de

vice-président mais, en application du neuvième alinéa de l’article 65 de la

Constitution, peut participer aux séances des formations du Conseil

supérieur qui ne sont pas relatives aux questions disciplinaires.

Par conséquent, le mode de désignation du secrétaire administratif du

Conseil supérieur, désormais dénommé secrétaire général pour tenir

compte de l’importance de ses attributions, est adapté (article 7). Le

premier alinéa de l’article 11 de la loi organique du 5 février 1994 précitée

est ainsi modifié pour prévoir que la nomination de ce magistrat - détaché

auprès du Conseil supérieur - est prononcée, pour une durée qui n’est plus

limitée, sur proposition conjointe du premier président de la Cour de

cassation et du procureur général près ladite Cour. Les chefs de la Cour de

cassation présidant désormais les formations du Conseil supérieur, il est

logique qu’ils puissent proposer la nomination du secrétaire général qui

assurera notamment le fonctionnement administratif de cet organe.

Pour les mêmes motifs, l’article 13 de la loi organique du

5 février 1994 précitée est modifié de manière à préciser que le Conseil

supérieur se réunit non plus sur convocation de son président ou de son

vice-président, mais sur convocation du président de la formation

(article 8). En conséquence, le deuxième alinéa de l’article 18 de la même

loi organique, qui prévoit qu’en matière disciplinaire, la formation

compétente se réunit sur convocation du premier président ou du procureur

– 6 –

général de la Cour de cassation, a vocation à disparaître. Est également

devenu sans objet le premier alinéa de l’article 18, qui pose une interdiction

pour le Président de la République et le garde des Sceaux, ministre de la

justice d’assister aux séances relatives à la discipline. En effet, l’article 65

de la Constitution explicite désormais cette interdiction pour le garde des

Sceaux, ministre de la justice et le Président de la République n’a plus

vocation à participer aux réunions du Conseil supérieur dont il n’est pas

membre et qu’il ne préside plus.

Les dispositions du troisième alinéa, relatives à la suppléance des

chefs de la Cour de cassation en matière disciplinaire, doivent en revanche

être maintenues, mais trouvent désormais logiquement leur place dans

l’article 14 de la loi organique du 5 février 1994 précitée, lequel fixe les

règles de fonctionnement du Conseil communes aux deux domaines de

compétence que constituent les nominations et la discipline. Il paraît en

effet opportun de prévoir également une suppléance lorsque le Conseil

supérieur statue en matière de nominations, dès lors que, dans la nouvelle

rédaction de l’article 65 de la Constitution, la suppléance du président du

Conseil n’est plus prévue (de l’article 9).

Le de l’article 9 augmente de trois membres le quorum prévu par

ce même article pour les délibérations du Conseil supérieur, dans la mesure

où cet organisme est composé de quinze membres, lorsqu’il statue en

matière de nominations, et de seize membres, lorsqu’il se réunit en matière

disciplinaire, au lieu de douze dans sa composition précédente.

L’article 10 tire les conséquences de l’extension des attributions du

Conseil supérieur de la magistrature en matière de nominations. Il est en

effet désormais prévu que la formation du Conseil supérieur compétente à

l’égard des magistrats du parquet donne son avis sur toutes les nominations

les concernant, alors qu’auparavant, elle n’émettait aucun avis sur les

nominations aux emplois pourvus en conseil des ministres, c’est-à-dire

pour le procureur général près la Cour de cassation et pour les procureurs

généraux près les cours d’appel. L’article 16 de la loi organique du

5 février 1994 précitée, qui excluait les nominations pourvues en conseil

des ministres du champ de compétence du Conseil supérieur, est modifié en

conséquence.

L’article 18 de la loi organique du 5 février 1994, dans sa nouvelle

rédaction issue de l’article 11 du présent projet, précise la composition et

les modalités de vote des sections du Conseil supérieur de la magistrature

qui participeront à la procédure d’examen des plaintes des justiciables dans

les conditions prévues par les articles 18 et 25 du présent projet de loi

organique.

– 7 –

Le chapitre II modifie l’ordonnance n° 58-1270 du

22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la

magistrature.

Complétant l’article 10 du présent projet, l’article 13 modifie

l’article 38 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée qui prévoit le

mode de nomination des magistrats du parquet placés hors hiérarchie, au

nombre desquels figurent le procureur général près la Cour de cassation et

les procureurs généraux près les cours d’appel.

L’article 38 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée, tel que

modifié par le présent projet, autorise désormais à instaurer, pour les

procureurs généraux près les cours d’appel, des garanties d’affectation au

terme des sept années d’exercice de leurs fonctions, identiques à celles

prévues pour les premiers présidents de cour d’appel. Le Conseil supérieur

de la magistrature a en effet compétence pour émettre un avis sur les

nominations à tous les emplois hors hiérarchie du parquet, de sorte qu’une

nomination concomitante des procureurs généraux à un emploi hors

hiérarchie de la Cour de cassation est désormais possible. L’article 38-1 de

l’ordonnance est donc modifié en ce sens par l’article 14.

L’article 15 a pour objet de remplacer l’appellation de la sanction

disciplinaire de réprimande par celle, plus appropriée, de blâme, tout en

maintenant la nécessité de son inscription au dossier. Afin de pouvoir

adapter davantage la sanction, il est en outre prévu que la suspension

éventuelle des droits à pension accompagnant la révocation peut n’être que

partielle.

L’article 49 de l’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée renvoie

désormais à l’article 14 de la loi organique du 5 février 1994 précitée,

s’agissant de la composition du Conseil de discipline des magistrats du

siège (article 16).

Les articles 17 et 24 du présent projet de loi organique améliorent la

procédure d’interdiction temporaire d’exercice applicable aux magistrats.

L’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée prévoit dans ses

articles 50 - pour ce qui concerne les magistrats du siège -, et 58-1 - pour ce

qui concerne les magistrats du parquet -, la possibilité, en cas d’urgence,

d’interdire à un magistrat faisant l’objet d’une enquête l’exercice de ses

fonctions jusqu’à décision définitive sur les poursuites disciplinaires.

Il s’agit d’une mesure qui ne constitue pas une sanction disciplinaire,

mais une décision prise dans l’intérêt du service.

– 8 –

Mesure exceptionnelle, elle se justifie lorsqu’un magistrat est mis en

cause pour des faits qui paraissent de nature à entraîner des poursuites

disciplinaires et qui sont d’une gravité et d’une notoriété telles, que le

maintien en exercice du magistrat risquerait d’affaiblir son autorité

juridictionnelle et de porter le discrédit sur l’institution judiciaire.

Dans ces situations, il y a urgence à écarter le magistrat concerné de

ses fonctions, pour ne pas compromettre le fonctionnement normal de la

justice. La mesure d’interdiction temporaire d’exercice doit donc intervenir

le plus rapidement possible et la procédure actuelle doit, sur ce point, être

améliorée. Les articles 50 et 58-1 sont donc modifiés pour faire en sorte

que le magistrat mis en cause puisse être écarté de ses fonctions à bref

délai, suivant des modalités qui préservent ses droits.

Les principales conditions posées sont donc reprises. Ainsi,

l’interdiction ne peut être décidée qu’en cas d’urgence et n’est susceptible

de concerner qu’un magistrat faisant l’objet d’une enquête, une précision

quant à la nature de cette enquête - administrative ou pénale - étant en outre

apportée par le présent projet. L’interdiction ne peut produire effet que

jusqu’à décision sur les poursuites disciplinaires ; elle constitue une mesure

prise dans l’intérêt du service ; elle n’emporte pas privation du droit au

traitement et ne peut être rendue publique. Dans le cas où, dans les deux

mois, le Conseil supérieur de la magistrature n’a pas été saisi de la

dénonciation des faits motivant les poursuites disciplinaires, l’interdiction

cesse de plein droit de produire ses effets.

Lorsque le garde des Sceaux, ministre de la justice est saisi d’une

plainte ou informé de faits paraissant de nature à entraîner des poursuites

disciplinaires, il peut, si les conditions de l’urgence et de l’existence d’une

enquête sont remplies, envisager une mesure d’interdiction temporaire. Les

dispositions actuelles prévoient que l’avis (pour les magistrats du siège) et

la proposition (pour les magistrats du parquet) des chefs hiérarchiques doit

être recueilli en premier lieu. Le présent projet précise qu’ils doivent être

désormais consultés.

Il s’agit d’accorder le même rôle aux chefs hiérarchiques du siège et

du parquet, la différence entre les deux situations n’étant plus justifiée.

L’harmonisation de la procédure applicable aux magistrats du siège et aux

magistrats du parquet est souhaitable et possible sur ce point. Cette

consultation doit en outre permettre au garde des Sceaux, ministre de la

justice de disposer d’un maximum d’informations sur la conduite du

magistrat tout en ne faisant pas obstacle à la poursuite de la procédure

d’interdiction temporaire.

– 9 –

Le Conseil supérieur de la magistrature est ensuite saisi, comme à

l’heure actuelle, par le garde des Sceaux, ministre de la justice, d’une

proposition - pour les magistrats du siège - ou d’une demande d’avis - pour

les magistrats du parquet - sur le prononcé d’une interdiction temporaire

d’exercice jusqu’à décision définitive sur les poursuites.

Le projet permet en outre aux chefs de cour de saisir le Conseil

supérieur aux mêmes fins. Pour les magistrats du siège, le Conseil

supérieur de la magistrature pourra donc être amené à prononcer une

interdiction temporaire sur proposition du premier président de la cour

d’appel ou du président du tribunal supérieur d’appel. Pour les magistrats

du parquet, le procureur général près la cour d’appel ou le procureur de la

République près le tribunal supérieur d’appel pourra demander au Conseil

supérieur de rendre un avis sur cette interdiction, le garde des Sceaux,

ministre de la justice demeurant libre de prendre une telle décision.

Quel que soit le mode de saisine, un délai de huit jours est imparti au

Conseil supérieur pour se prononcer. À défaut pour le Conseil de pouvoir

se réunir dans ce délai, c’est le président de la formation concernée qui

rend une décision ou un avis, dans ce même délai. En cas d’absence ou

d’empêchement, il est suppléé par le magistrat du siège ou du parquet hors

hiérarchie de la Cour de cassation membre du Conseil supérieur.

Deux dispositifs distincts sont ensuite prévus, selon qu’est concerné

un magistrat du siège ou un magistrat du parquet.

Pour les magistrats du siège, le président du conseil de discipline peut

prendre, à titre conservatoire, une mesure d’interdiction temporaire. Quelle

que soit la décision prise par ce dernier, le Conseil supérieur, qui demeure

saisi, doit ensuite statuer dans le délai de quinze jours, sur la proposition

formulée par le garde des Sceaux, ministre de la justice ou par le chef de

cour d’interdire au magistrat l’exercice de ses fonctions jusqu’à la décision

définitive sur les poursuites disciplinaires. Une garantie supplémentaire est

prévue pour le magistrat, en ce que l’interdiction d’exercice prononcée le

cas échéant par le premier président de la Cour de cassation cesse de

produire effet si le Conseil supérieur n’a pas rendu sa décision dans le délai

de quinze jours.

Pour les magistrats du parquet, le garde des Sceaux, ministre de la

justice, peut prendre une mesure d’interdiction temporaire à la suite de

l’avis rendu par le procureur général près la Cour de cassation. Dans ce cas,

il saisit la formation compétente du Conseil supérieur afin qu’elle rende un

avis, dans le délai de quinze jours suivant la notification de l’interdiction,

sur la prolongation de la mesure jusqu’à la décision définitive sur les

– 10 –

poursuites disciplinaires. La garantie posée pour le magistrat concerné

consiste dans ce cas à prévoir qu’à l’expiration d’un délai de

soixante-douze heures suivant l’avis rendu par la Conseil supérieur, et, à

défaut de décision de prolongation prise par le garde des Sceaux, ministre

de la justice l’interdiction cesse de plein de droit de produire ses effets.

Les articles 18, 19, 21, 23, 25, 26 et 28 du présent projet ont pour

objet de préciser les cas dans lesquels les justiciables peuvent saisir le

Conseil et la procédure qui est alors suivie par ce dernier.

L’alinéa 10 de l’article 65 de la Constitution, tel qu’il résulte de la loi

constitutionnelle du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la

Ve République, est ainsi rédigé : « Le Conseil supérieur de la magistrature

peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi

organique. »

Les articles 18 et 25 du présent projet insèrent dans l’ordonnance du

22 décembre 1958 précitée un article 50-3 - pour les magistrats du siège -

et huit alinéas dans l’article 63 - pour les magistrats du parquet -, afin de

déterminer les conditions encadrant ce nouveau mode de saisine

disciplinaire du Conseil supérieur de la magistrature. Dans le cadre de

l’habilitation constitutionnelle, ces conditions sont établies pour éviter une

contestation des décisions de justice en dehors des voies de recours

légalement prévues à cet effet et pour faire échec aux tentatives de

déstabilisation des magistrats.

L’article 25 comporte par ailleurs des dispositions de coordination

relatives aux modes de saisine du Conseil supérieur, afin de supprimer une

différence rédactionnelle entre l’article 50-2 et l’article 63, qui n’était pas

justifiée.

Le premier alinéa du nouvel article 50-3 et le quatrième alinéa

nouveau de l’article 63 consacrent le droit pour tout justiciable qui estime

qu’à l’occasion d’une procédure judiciaire le concernant, le comportement

adopté par un magistrat dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de

recevoir une qualification disciplinaire, de saisir le Conseil supérieur de la

magistrature. Afin de ne pas porter atteinte à la sérénité nécessaire du

travail des magistrats, la saisine ne pourra toutefois intervenir - à peine

d’irrecevabilité - tant que le magistrat du siège sera saisi de la procédure en

cause ou tant que le parquet ou le parquet général auquel appartient le

magistrat du parquet sera en charge de la procédure, cette différence étant

justifiée par le principe d’indivisibilité du ministère public. En outre, la

plainte ne pourra être présentée après l’expiration d’un délai de six mois

suivant la décision définitive mettant fin à la procédure.

– 11 –

Dans un même souci de préserver le bon fonctionnement de

l’institution judiciaire, il est expressément indiqué que la saisine du Conseil

supérieur par un justiciable ne constitue pas une cause de récusation d’un

magistrat du siège. La procédure de récusation pourra, par ailleurs, être

mise en oeuvre si les conditions prévues aux articles 341 et suivants du code

de procédure civile ou aux articles 668 et suivants du code de procédure

pénale sont remplies.

Ces mêmes articles fixent des conditions à la recevabilité formelle des

plaintes. Sont ainsi irrecevables les plaintes anonymes. La plainte doit, en

outre, contenir l’indication détaillée des faits et griefs allégués ainsi que des

éléments d’identification de la procédure concernée.

Sans remettre en cause le droit de saisine directe du Conseil supérieur

par les justiciables, il paraît nécessaire d’instaurer un dispositif qui évitera

des convocations multiples de magistrats à des audiences disciplinaires

- lesquelles nuiraient inévitablement à l’exercice serein de leur fonctions -

dans des cas où la plainte ne respecte pas les conditions de recevabilité, où

les allégations du justiciable sont manifestement infondées ou encore

lorsque les faits ne sont pas susceptibles de recevoir une qualification

disciplinaire.

Un système de filtrage identique pour les magistrats du siège et du

parquet est institué par le présent projet. Les articles 50-3 et 63 de

l’ordonnance du 22 décembre 1958 précitée organisent l’examen préalable

de la plainte par une section du Conseil supérieur composée de membres de

la formation compétente à l’égard du magistrat visé dans la plainte, et

renvoient à l’article 18 de la loi organique du 5 février 1994 précitée les

précisions relatives à la composition de cette section. Cet article 18, dans sa

nouvelle rédaction issue de l’article 11 du présent projet de loi organique,

précise la composition et les modalités de vote des sections du Conseil

supérieur de la magistrature chargées du filtrage des plaintes des

justiciables. Pour chaque formation, il existe une ou plusieurs sections

composées de quatre de ses membres (deux magistrats et deux

personnalités extérieures au corps judiciaire). Le président de la formation

en désigne - pour un an - les membres et le président. S’agissant des

délibérations, elles ne sont valables que si un quorum de trois membres est

respecté et elles sont prises à la majorité des voix. En cas de partage égal

des voix, l’examen de la plainte est renvoyé à la formation compétente du

Conseil supérieur. Afin de garantir le respect du principe d’impartialité, les

membres des sections se voient interdire de siéger dans la formation

disciplinaire à laquelle ils ont renvoyé l’examen d’une plainte.

– 12 –

Le président de la section du Conseil supérieur peut rejeter les plaintes

manifestement abusives ou irrecevables. La section peut déclarer la plainte

irrecevable ou manifestement infondée. Dans le cas contraire, elle demande

au chef de cour dont dépend le magistrat de lui communiquer ses

observations et toutes informations utiles. Le chef de cour invite alors le

magistrat à lui adresser ses observations et doit transmettre l’ensemble des

éléments au Conseil supérieur, ainsi qu’au garde des Sceaux, ministre de la

justice, dans un délai de deux mois. A ce stade, la désignation d’un

rapporteur dans les conditions prévues aux articles 51 et 63 n’est pas

possible. Elle ne peut intervenir qu’après que la section du Conseil

supérieur a procédé à l’examen de la plainte (article 19 et le 5° de

l’article 25).

La section du Conseil supérieur vérifie que les faits sont susceptibles

de recevoir une qualification disciplinaire, c’est-à-dire que les conditions

de l’engagement d’une poursuite disciplinaire sont réunies, notamment

celle posée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2007-551 DC

du 1er mars 2007, dans le cas d’une « violation grave et délibérée d’une

règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des

parties ». Dans le cas contraire, la plainte est rejetée.

Le justiciable, le magistrat concerné, le chef de cour et le garde des

Sceaux, ministre de la justice sont avisés des suites données à la plainte. La

décision de rejet n’est susceptible d’aucun recours, de quelque nature que

ce soit.

Il convient, par ailleurs, de rappeler que la saisine du Conseil

supérieur de la magistrature par un justiciable de faits qu’il saurait

totalement ou partiellement inexacts fera encourir à ce dernier les peines

prévues par l’article 226-10 du code pénal, réprimant l’infraction de

dénonciation calomnieuse.

En outre, le garde des Sceaux, ministre de la justice et le chef de cour

conserveront la faculté de saisir, le cas échéant, le Conseil supérieur de la

magistrature sur la base des faits dénoncés.

Enfin, les articles 53 et 64 de l’ordonnance du 22 décembre 1958

précitée sont complétés par les articles 21 et 26 du présent projet afin de

préciser que lorsque le Conseil supérieur a été saisi à l’initiative d’un

justiciable, l’audience ne peut pas se tenir avant l’expiration d’un délai de

trois mois suivant la date à laquelle le garde des Sceaux a été avisé du

renvoi de l’examen de la plainte à la formation compétente du Conseil

supérieur. Il importe en effet de laisser s’écouler un temps suffisant pour

– 13 –

permettre au garde des Sceaux, ministre de la justice de faire réaliser, le cas

échéant, une enquête par l’Inspection générale des services judiciaires.

Enfin, en application des articles 58 et 66 de l’ordonnance du

22 décembre 1958 précitée, tels que modifiés par les articles 23 et 28 du

présent projet, le justiciable ne pourra exercer aucun recours, de quelque

nature que ce soit, contre la décision prise, soit par le conseil de discipline,

soit par le garde des Sceaux, ministre de la justice, sur les poursuites

disciplinaires.

L’article 20 modifie l’article 52 de l’ordonnance du

22 décembre 1958 précitée. Il s’agit d’offrir explicitement au rapporteur

désigné parmi les membres du Conseil supérieur de la magistrature la

possibilité de désigner un expert, même si le texte actuel, qui fixe les règles

de la procédure d’enquête disciplinaire, prévoit - de manière très générique

- qu’il « accomplit tous actes d’investigations utiles ». Ce texte, qui se situe

- au sein du chapitre VII relatif à la discipline - dans la section II consacrée

à la discipline des magistrats du siège, aura également vocation à

s’appliquer aux magistrats du parquet dès lors que l’article 63, alinéa 4, de

l’ordonnance situé dans la section III - renvoie à cette disposition.

Les articles 22 et 27 créent deux articles 57-1 et 65-1 qui précisent les

règles de vote applicables aux décisions et avis pris par le Conseil supérieur

de la magistrature en matière disciplinaire.

Le chapitre III est relatif aux dispositions transitoires.

Le I de l’article 29 du présent projet permet au Conseil supérieur de la

magistrature de rester compétent, dans sa composition et selon ses

attributions actuelles, jusqu’à sa première réunion dans sa composition

issue de la loi constitutionnelle et selon les modalités prévues par la

présente loi organique.

Le II prévoit cependant un tempérament à cette disposition, en rendant

immédiatement applicables, à compter de la publication de la loi organique,

les dispositions relatives à l’interdiction temporaire d’exercice, excepté

pour les mesures déjà en cours d’examen par le Conseil supérieur de la

magistrature.

– 14 –

– 15 –

PROJET DE LOI ORGANIQUE

Le Premier ministre,

Sur le rapport du garde des Sceaux, ministre de la justice,

Vu l’article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi relatif à l’application de l’article 65 de la

Constitution, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil

d’État, sera présenté au Sénat par le garde des Sceaux, ministre de la

justice, qui sera chargée d’en exposer les motifs et d’en soutenir la

discussion.

CHAPITRE IER

Dispositions modifiant la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur

le Conseil supérieur de la magistrature

Article 1er

Après l’article 4 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le

Conseil supérieur de la magistrature, il est inséré un article 4-1 ainsi

rédigé :

« Art. 4-1. — Les magistrats siégeant dans la formation plénière du

Conseil supérieur de la magistrature sont, outre son président :

« 1° Le premier président de cour d’appel mentionné au 2° de

l’article 1er, pendant la première moitié de son mandat ;

« 2° Le procureur général près une cour d’appel mentionné au 2° de

l’article 2, pendant la seconde moitié de son mandat ;

« 3° Le président de tribunal de grande instance mentionné au 3° de

l’article 1er, pendant la seconde moitié de son mandat ;

« 4° Le procureur de la République près un tribunal de grande instance

mentionné au 3° de l’article 2, pendant la première moitié de son mandat ;

– 16 –

« 5° Les deux magistrats du siège mentionnés au 4° de l’article 1er,

pour toute la durée de leur mandat ;

« 6° Les deux magistrats du parquet mentionnés au 4° de l’article 2,

pour toute la durée de leur mandat. »

Article 2

À l’article 5 de la même loi, le mot : « deux » est remplacé par le

mot : « trois ».

Article 3

Après l’article 5 de la même loi, sont insérés deux articles 5-1 et 5-2

ainsi rédigés :

« Art. 5-1. — L’avocat qui siège dans les trois formations du Conseil

supérieur de la magistrature est désigné par le président du Conseil national

des barreaux, après avis de l’assemblée générale dudit conseil.

« Art. 5-2. — Les nominations des personnalités qualifiées

mentionnées à l’article 65 de la Constitution sont soumises, dans les

conditions prévues par cet article, à la commission compétente en matière

d’organisation judiciaire de chaque assemblée. »

Article 4

Le deuxième alinéa de l’article 6 de la même loi est ainsi rédigé :

« Aucun membre ne peut, pendant la durée de ses fonctions, exercer la

profession d’officier public ou ministériel ni aucun mandat électif ni, à

l’exception du membre désigné en cette qualité en application du deuxième

alinéa de l’article 65 de la Constitution, la profession d’avocat. »

Article 5

Après le troisième alinéa de l’article 7 de la même loi, il est inséré un

alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’une vacance se produit avant la date normale d’expiration

des mandats des autres membres du Conseil supérieur, ces derniers sont

remplacés selon les modalités prévues pour leur désignation initiale. Les

– 17 –

membres ainsi désignés achèvent le mandat des membres qu’ils

remplacent. »

Article 6

Au premier alinéa de l’article 8 de la même loi, les mots : « d’une

promotion de grade » sont remplacés par les mots : « d’un avancement de

grade, ni d’une promotion à une fonction hors hiérarchie, » et le mot :

« mutation » est remplacé par les mots : « nomination à un autre emploi ».

Article 7

Le premier alinéa de l’article 11 de la même loi est remplacé par les

dispositions suivantes :

« Le secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature est

nommé par décret du Président de la République sur proposition conjointe

du premier président de la Cour de cassation et du procureur général près

ladite Cour, parmi les magistrats justifiant de sept ans de services effectifs

en qualité de magistrat. Il est placé en position de détachement et ne peut

exercer aucune autre fonction. »

Article 8

À l’article 13 de la même loi, les mots : « de son président ou, le cas

échéant, du ministre de la justice, vice-président » sont remplacés par les

mots : « du président de la formation ».

Article 9

L’article 14 de la même loi est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas d’empêchement, le premier président de la Cour de cassation

et le procureur général près ladite Cour peuvent être suppléés

respectivement par le magistrat hors hiérarchie du siège ou du parquet de la

Cour de cassation, membre de la formation compétente. » ;

2° Au premier alinéa devenu deuxième, le mot : « cinq » est remplacé

par le mot : « huit » ;

– 18 –

Article 10

À l’article 16 de la même loi, les mots : « autres que celles pourvues

en conseil des ministres » sont supprimés.

Article 11

L’article 18 de la même loi est remplacé par les dispositions

suivantes :

« Art. 18. — L’examen des plaintes dont les justiciables saisissent le

Conseil supérieur de la magistrature est confié à une ou plusieurs sections.

Chaque section est composée, pour chaque formation, de quatre de ses

membres, deux magistrats et deux personnalités extérieures au corps

judiciaire, désignés chaque année par le président de la formation.

« Le président de la section est désigné par le président de la

formation. Ses membres ne peuvent siéger dans la formation disciplinaire

lorsque celle-ci est saisie d’une affaire qui lui a été renvoyée par la section

dont ils sont membres.

« La section examine les plaintes présentées par les justiciables, dans

les conditions prévues aux articles 50-3 et 63 de la loi organique relative au

statut de la magistrature.

« La section délibère valablement si trois de ses membres sont

présents.

« Elle se prononce à la majorité des voix. En cas de partage égal des

voix, l’examen de la plainte est renvoyé à la formation compétente du

Conseil supérieur.

Article 12

I. — Après l’article 20-1 de la même loi, il est inséré un article 20-2

ainsi rédigé :

« Art. 20-2. - La formation plénière du Conseil supérieur a

compétence pour connaître des demandes formulées soit par le Président de

la République, au titre de l’article 64 de la Constitution, soit par le garde

des Sceaux, ministre de la justice, sur les questions énumérées par

l’article 65 de la Constitution. Elle élabore et rend public un recueil des

obligations déontologiques des magistrats. »

II. — Le dernier alinéa de l’article 20 de la même loi est abrogé.

– 19 –

CHAPITRE II

Dispositions modifiant l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958

portant loi organique relative au statut de la magistrature

Article 13

L’article 38 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant

loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi rédigé :

« Art. 38. —Les magistrats du parquet placés hors hiérarchie sont

nommés par décret du Président de la République après avis du Conseil

supérieur de la magistrature. »

Article 14

L’article 38-1 de la même ordonnance est ainsi rédigé :

« Art. 38-1. — La fonction de procureur général près une cour d’appel

est exercée par un magistrat hors hiérarchie du parquet de la Cour de

cassation, désigné à cet effet dans les formes prévues à l’article 38.

« S’il n’occupe pas déjà cet emploi lors de sa désignation en qualité de

procureur général conformément à l’alinéa précédent, le magistrat est

nommé concomitamment à un emploi hors hiérarchie du parquet de la Cour

de cassation. En ce cas, les dispositions du troisième alinéa de l’article 39

ne sont pas applicables.

« Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur

général près une même cour d’appel.

« Six mois au moins avant l’expiration de cette période, le procureur

général peut solliciter sa nomination en qualité d’inspecteur général adjoint

des services judiciaires. Cette nomination est alors de droit au terme des

sept années d’exercice de ses fonctions.

« À l’expiration de cette période, s’il n’a pas reçu d’autre affectation,

le procureur général est déchargé de cette fonction par décret du Président

de la République et exerce au sein de la Cour de cassation les fonctions

auxquelles il a été initialement nommé. Il en est de même dans le cas où,

avant ce terme, il est déchargé de cette fonction sur sa demande ou en

application de l’article 45. »

– 20 –

Article 15

L’article 45 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Au 1°, les mots : « La réprimande » sont remplacés par les mots :

« Le blâme » ;

2° Au 7°, après le mot : « suspension » sont insérés les mots : « , totale

ou partielle, ».

Article 16

L’article 49 de la même ordonnance est ainsi rédigé :

« Art. 49. —Le conseil de discipline des magistrats du siège est

composé conformément aux dispositions de l’article 65 de la Constitution

et de l’article 14 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le

Conseil supérieur de la magistrature. »

Article 17

L’article 50 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase du premier alinéa, avant le mot : « peut »

sont insérés les mots : « saisi d’une plainte ou informé de faits paraissant de

nature à entraîner des poursuites disciplinaires, » ; le mot : « avis » est

remplacé par le mot : « consultation » et après le mot : « enquête » sont

ajoutés les mots : « administrative ou pénale » ;

2° La deuxième phrase du premier alinéa est remplacée par les

dispositions suivantes :

« Les premiers présidents de cour d’appel ou les présidents de tribunal

supérieur d’appel, informés de faits paraissant de nature à entraîner des

poursuites disciplinaires contre un magistrat du siège, peuvent également,

s’il y a urgence, saisir le Conseil supérieur aux mêmes fins. Ce dernier

statue dans les huit jours suivant sa saisine. » ;

3° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« En cas d’impossibilité pour le Conseil supérieur de se réunir dans les

huit jours, le premier président de la Cour de cassation, en qualité de

président de la formation du Conseil supérieur compétente à l’égard des

magistrats du siège statuant comme conseil de discipline, décide dans ce

délai s’il y a lieu de prononcer à titre conservatoire une mesure

– 21 –

d’interdiction temporaire. En cas d’absence ou d’empêchement, il est

suppléé par le magistrat du siège hors hiérarchie de la Cour de cassation

membre du Conseil supérieur.

« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit ensuite dans un

délai de quinze jours pour statuer sur la proposition d’interdiction

temporaire formée par le garde des Sceaux, par le premier président de cour

d’appel ou par le président de tribunal supérieur d’appel. En l’absence de

décision du Conseil supérieur dans ce délai, lorsque le président du conseil

de discipline a pris une décision d’interdiction temporaire d’exercice dans

les conditions prévues à l’alinéa précédent, l’interdiction cesse de plein

droit de produire ses effets.

« La décision d’interdiction temporaire, prise dans l’intérêt du service,

ne peut être rendue publique ; elle ne comporte pas privation du droit au

traitement. » ;

4° Au dernier alinéa, après le mot : « mois » sont ajoutés les mots :

« suivant la notification de l’interdiction temporaire prononcée par le

conseil de discipline ou, le cas échéant, par son président » ; les

mots : « par le garde des Sceaux, ministre de la justice, » sont supprimés et

les mots : « à l’article 50-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles

50-1 et 50-2 ».

Article 18

Après l’article 50-2 de la même ordonnance, il est inséré un article

50-3 ainsi rédigé :

« Art. 50-3. — Tout justiciable qui estime qu’à l’occasion d’une

procédure judiciaire le concernant, le comportement adopté par un

magistrat du siège dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de

recevoir une qualification disciplinaire, peut saisir le Conseil supérieur de

la magistrature. La saisine du Conseil supérieur de la magistrature ne

constitue pas une cause de récusation du magistrat.

« À peine d’irrecevabilité, la plainte ne peut être dirigée contre un

magistrat qui demeure saisi de la procédure. Elle peut être présentée

jusqu’à l’expiration d’un délai de six mois suivant la décision définitive

mettant fin à la procédure. Elle doit contenir l’indication détaillée des faits

et griefs allégués. Elle doit être signée par le plaignant et indiquer son

identité et son adresse, ainsi que les éléments permettant d’identifier la

procédure en cause.

– 22 –

« La plainte est d’abord examinée par une section du Conseil

supérieur composée de membres de la formation compétente à l’égard des

magistrats du siège, dans les conditions prévues par l’article 18 de la loi

organique sur le Conseil supérieur de la magistrature.

« Le président de la section peut rejeter les plaintes manifestement

abusives ou irrecevables.

« Lorsque la section du Conseil supérieur n’a pas déclaré la plainte

irrecevable ou manifestement infondée, elle sollicite du premier président

de la cour d’appel ou du président du tribunal supérieur d’appel dont

dépend le magistrat mis en cause ses observations et tous éléments

d’informations utiles. Le premier président de la cour d’appel ou le

président du tribunal supérieur d’appel invite le magistrat à lui adresser ses

observations. Dans le délai de deux mois de la demande qui lui en est faite

par la section du Conseil supérieur, le premier président de la cour d’appel

ou le président du tribunal supérieur d’appel adresse l’ensemble de ces

informations et observations au Conseil supérieur de la magistrature, ainsi

qu’au garde des Sceaux, ministre de la justice.

« Lorsqu’elle estime que les faits sont susceptibles de recevoir une

qualification disciplinaire, la section du Conseil supérieur renvoie l’examen

de la plainte à la formation compétente pour la discipline des magistrats du

siège.

« En cas de rejet de la plainte, les autorités mentionnées aux

articles 50-1 et 50-2 conservent la faculté de saisir le Conseil supérieur de

la magistrature des faits dénoncés.

« Le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour visé au

cinquième alinéa et le garde des Sceaux, ministre de la justice, sont avisés

du rejet de la plainte ou de la poursuite de la procédure disciplinaire.

« La décision de rejet de la plainte est insusceptible de recours. »

Article 19

Le deuxième alinéa de l’article 51 de la même ordonnance est

complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le Conseil supérieur de la

magistrature a été saisi à l’initiative d’un justiciable, la désignation du

rapporteur n’intervient qu’après l’examen de la plainte par la section du

Conseil supérieur mentionnée à l’article 50-3. »

– 23 –

Article 20

La dernière phrase du premier alinéa de l’article 52 de la même

ordonnance est complétée par les mots : « et peut procéder à la désignation

d’un expert ».

Article 21

L’article 53 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi

rédigé :

« Lorsque le Conseil supérieur a été saisi à l’initiative d’un justiciable,

l’audience disciplinaire ne peut se tenir avant l’expiration d’un délai de

trois mois après que le garde des Sceaux, ministre de la justice, a été avisé

dans les conditions prévues au huitième alinéa de l’article 50-3. »

Article 22

Après l’article 57 de la même ordonnance, il est inséré un article 57-1

ainsi rédigé :

« Art. 57-1. — Lorsqu’elle se prononce sur l’existence d’une faute

disciplinaire, la formation compétente du Conseil supérieur renvoie, en cas

de partage égal des voix, le magistrat concerné des fins de la poursuite.

« Lorsque la formation compétente a constaté l’existence d’une faute

disciplinaire, la sanction prononcée à l’égard du magistrat du siège est prise

à la majorité des voix. En cas de partage égal des voix sur le choix de la

sanction, la voix du président de la formation est prépondérante. »

Article 23

L’article 58 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi

rédigé :

« Le recours contre la décision de la formation disciplinaire n’est pas

ouvert à l’auteur de la plainte. »

Article 24

L’article 58-1 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « et sur proposition des chefs

hiérarchiques, après » sont remplacés par les mots : « après consultation

– 24 –

des chefs hiérarchiques et » et après le mot : « enquête » sont ajoutés les

mots : « administrative ou pénale » ;

2° La deuxième phrase du premier alinéa est remplacée par les

dispositions suivantes :

« Les procureurs généraux près les cours d’appel ou les procureurs de

la République près les tribunaux supérieurs d’appel, informés de faits

paraissant de nature à entraîner des poursuites disciplinaires contre un

magistrat du parquet, peuvent également, s’il y a urgence, saisir la

formation compétente du Conseil supérieur aux fins d’avis sur le prononcé,

par le garde des Sceaux, ministre de la justice, d’une telle interdiction. Le

Conseil supérieur rend son avis dans un délai de huit jours suivant sa

saisine. » ;

3° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« En cas d’impossibilité pour le Conseil supérieur de se réunir dans le

délai de huit jours, le procureur général près la Cour de cassation, en

qualité de président de la formation du Conseil supérieur de la magistrature

compétente à l’égard des magistrats du parquet, rend dans ce délai un avis

sur l’interdiction. En cas d’absence ou d’empêchement, il est suppléé par le

magistrat du parquet hors hiérarchie de la Cour de cassation membre du

Conseil supérieur.

« Lorsque l’interdiction temporaire a été prononcée à la suite de l’avis

rendu par le procureur général près la Cour de cassation dans les conditions

prévues à l’alinéa précédent, la formation du Conseil supérieur de la

magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet, saisie à cet

effet par le garde des Sceaux, ministre de la justice, émet, dans un délai de

quinze jours suivant la notification de la mesure, un avis sur la

prolongation, jusqu’à la décision définitive sur les poursuites disciplinaires,

de l’interdiction temporaire. Si à l’expiration d’un délai de

soixante-douze heures suivant l’avis émis par le Conseil supérieur de la

magistrature, l’interdiction temporaire d’exercice n’a pas été prolongée par

le garde des Sceaux, ministre de la justice, elle cesse de plein droit de

produire ses effets.

« La décision d’interdiction temporaire, prise dans l’intérêt du service,

ne peut être rendue publique ; elle ne comporte pas privation du droit au

traitement. » ;

4° Au dernier alinéa, après le mot : « mois » sont ajoutés les mots :

« suivant la notification de l’interdiction temporaire prononcée par le garde

des Sceaux, ministre de la justice, » et après le mot : « saisi » sont ajoutés

– 25 –

les mots : « dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de

l’article 63 ».

Article 25

L’article 63 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :

« Le Conseil supérieur de la magistrature est saisi par la dénonciation

des faits motivant les poursuites disciplinaires que lui adresse le garde des

Sceaux, ministre de la justice. » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « Le procureur général près la Cour

de cassation » sont remplacés par les mots : « Le Conseil supérieur de la

magistrature » ;

3° Après le troisième alinéa, il est inséré huit alinéas ainsi rédigés :

« Tout justiciable qui estime, qu’à l’occasion d’une procédure

judiciaire le concernant, le comportement adopté par un magistrat du

parquet dans l’exercice de ses fonctions est susceptible de recevoir une

qualification disciplinaire, peut saisir le Conseil supérieur de la

magistrature.

« À peine d’irrecevabilité, la plainte ne peut être dirigée contre un

magistrat lorsque le parquet ou le parquet général auquel il appartient

demeure en charge de la procédure. Elle peut être présentée jusqu’à

l’expiration d’un délai de six mois suivant la décision définitive mettant fin

à la procédure. Elle doit contenir l’indication détaillée des faits et griefs

allégués. Elle doit être signée par le plaignant et indiquer son identité et son

adresse, ainsi que les éléments permettant d’identifier la procédure en

cause.

« Le président de la section peut rejeter les plaintes manifestement

abusives ou irrecevables.

« Lorsque la section du Conseil supérieur n’a pas déclaré la plainte

irrecevable ou manifestement infondée, elle sollicite du procureur général

près la cour d’appel ou du procureur de la République près le tribunal

supérieur d’appel dont dépend le magistrat mis en cause, ses observations

et tous éléments d’informations utiles. Le procureur général près la cour

d’appel ou le procureur de la République près le tribunal supérieur d’appel

invite le magistrat à lui adresser ses observations. Dans le délai de

deux mois de la demande qui lui en est faite par la section du Conseil

– 26 –

supérieur, le procureur général près la cour d’appel ou le procureur de la

République près le tribunal supérieur d’appel adresse l’ensemble de ces

informations et observations au Conseil supérieur de la magistrature, ainsi

qu’au garde des Sceaux, ministre de la justice.

« Lorsqu’elle estime que les faits sont susceptibles de recevoir une

qualification disciplinaire, la section du Conseil supérieur renvoie l’examen

de la plainte à la formation du Conseil supérieur compétente pour la

discipline des magistrats du parquet.

« En cas de rejet de la plainte, les autorités mentionnées aux deux

premiers alinéas du présent article conservent la faculté de saisir le Conseil

supérieur de la magistrature des faits dénoncés.

« Le magistrat visé par la plainte, le justiciable, le chef de cour visé au

septième alinéa et le garde des Sceaux, ministre de la justice, sont avisés du

rejet de la plainte ou de la poursuite de la procédure disciplinaire.

« La décision de rejet de la plainte est insusceptible de recours. » ;

4° Au quatrième alinéa devenu onzième, le mot : « cette » est

remplacé par le mot : « la » et après le mot : « saisine » sont ajoutés les

mots : « du Conseil supérieur de la magistrature » ;

5° Après la deuxième phrase du dernier alinéa, il est inséré une phrase

ainsi rédigée : « Lorsque le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi

par un justiciable, la désignation du rapporteur n’intervient qu’après

l’examen de la plainte par la section du Conseil supérieur visée aux alinéas

précédents. »

Article 26

Après le premier alinéa de l’article 64 de la même ordonnance, il est

inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le Conseil supérieur de la magistrature a été saisi à

l’initiative d’un justiciable, l’audience ne peut pas se tenir avant

l’expiration d’un délai de trois mois après que le garde des Sceaux, ministre

de la justice, a été avisé dans les conditions prévues au dixième alinéa de

l’article 63. »

– 27 –

Article 27

Il est rétabli, dans la même ordonnance, un article 65-1 ainsi rédigé :

« Art. 65-1. — Lorsqu’elle se prononce sur l’existence d’une faute

disciplinaire, la formation compétente du Conseil supérieur émet, en cas de

partage égal des voix, un avis en faveur de l’absence de sanction.

« Lorsqu’elle a constaté l’existence d’une faute disciplinaire, l’avis

émis sur la sanction est pris à la majorité des voix. En cas de partage égal

des voix sur le choix de la sanction, la voix du président de la formation est

prépondérante. »

Article 28

L’article 66 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi

rédigé :

« Le recours contre la décision prise à la suite de l’avis de la formation

disciplinaire n’est pas ouvert à l’auteur de la plainte. »

CHAPITRE III

Dispositions finales

Article 29

I. — Jusqu’à sa première réunion dans sa composition issue de la loi

constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des

institutions de la Ve République, le Conseil supérieur de la magistrature

exerce les compétences qui lui étaient conférées en vertu de l’article 65 de

la Constitution dans sa rédaction antérieure à la même loi.

II. — Toutefois, les dispositions des articles 17 et 24 s’appliqueront

aux mesures d’interdiction temporaire dont le garde des Sceaux ou les

chefs de cour saisiront le Conseil supérieur de la magistrature, à compter de

la publication de la présente loi organique.

Fait à Paris, le 10 juin 2009

Signé : FRANÇOIS FILLON

Par le Premier ministre :

Le garde des Sceaux, ministre de la justice

Signé : RACHIDA DATI

 

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 Décision n° 2007-551 DC

Loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 22 février 2007, par le Premier ministre, conformément aux articles 46, alinéa 5, et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l'État ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu la loi organique n° 93-1252 du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République ;

Vu la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 modifiée sur le Conseil supérieur de la magistrature ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que la loi organique soumise à l'examen du Conseil constitutionnel comporte trente-six articles regroupés en trois chapitres ; qu'elle a été adoptée sur le fondement du troisième alinéa de l'article 64 de la Constitution et du dernier alinéa de ses articles 65 et 68-2, dans le respect des règles de procédure fixées par son article 46 ; qu'elle modifie l'ordonnance du 22 décembre 1958 et les lois organiques des 23 novembre 1993 et 5 février 1994 susvisées ;

- SUR LE CHAPITRE IER :

2. Considérant que le chapitre premier de la loi organique, intitulé : " Dispositions relatives à la formation et au recrutement des magistrats ", comporte les articles 1 à 13 ; qu'il n'appelle pas de remarque de constitutionnalité ;

- SUR LE CHAPITRE II :

3. Considérant que le chapitre II de la loi organique, intitulé : " Dispositions relatives à la discipline ", comporte les articles 14 à 22 ; qu'il est relatif, en son article 14, à la définition de la faute disciplinaire et, en son article 21, à l'examen des réclamations portant sur le comportement d'un magistrat ;

. En ce qui concerne les normes applicables :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 64 de la Constitution : " Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire. - Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. - Une loi organique porte statut des magistrats. - Les magistrats du siège sont inamovibles " ;

. En ce qui concerne la définition de la faute disciplinaire :

6. Considérant que l'article 14 de la présente loi modifie l'article 43 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée qui définit la faute disciplinaire comme " tout manquement par un magistrat aux devoirs de son état, à l'honneur, à la délicatesse ou à la dignité " ; que le 1° de cet article 14 précise que " constitue un des manquements aux devoirs de son état la violation grave et délibérée par un magistrat d'une règle de procédure constituant une garantie essentielle des droits des parties, commise dans le cadre d'une instance close par une décision de justice devenue définitive " ;

7. Considérant que l'indépendance de l'autorité judiciaire, garantie par l'article 64 de la Constitution, et le principe de la séparation des pouvoirs, proclamé par l'article 16 de la Déclaration de 1789, n'interdisent pas au législateur organique d'étendre la responsabilité disciplinaire des magistrats à leur activité juridictionnelle en prévoyant qu'une violation grave et délibérée d'une règle de procédure constituant une garantie

essentielle des droits des parties puisse engager une telle responsabilité ; que, toutefois, ces mêmes principes font obstacle à l'engagement de poursuites disciplinaires lorsque cette violation n'a pas été préalablement constatée par une décision de justice devenue définitive ;

8. Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de déclarer contraires à la Constitution les dispositions du 1° de l'article 14 de la loi organique ; qu'il en va de même des dispositions de coordination prévues par son 2°, qui en sont inséparables ;

. En ce qui concerne l'examen des réclamations portant sur le comportement d'un magistrat :

9. Considérant que l'article 21 de la loi organique insère dans l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée un nouvel article 48-2 relatif à l'examen des réclamations des justiciables portant sur le comportement d'un magistrat ; que cet article 48-2 dispose que toute personne physique ou morale qui estime, à l'occasion d'une affaire la concernant, qu'un tel comportement est susceptible de constituer une faute disciplinaire, peut saisir directement le Médiateur de la République d'une réclamation ; qu'il prévoit que, pour l'examen de cette réclamation, le Médiateur est assisté d'une commission qu'il préside et qui est composée de cinq autres personnes dont quatre au moins n'appartiennent pas à l'ordre judiciaire ;

10. Considérant que l'article 16 de la Déclaration de 1789 et l'article 64 de la Constitution garantissent l'indépendance des juridictions ainsi que le caractère spécifique de leurs fonctions, sur lesquelles ne peuvent empiéter ni le législateur, ni le Gouvernement, non plus qu'aucune autorité administrative ;

11. Considérant que, si le législateur organique a précisé que le Médiateur ne pouvait porter une appréciation sur les actes juridictionnels, le nouvel article 48-2 lui donne néanmoins le droit de " solliciter tous éléments d'information utiles " auprès des premiers présidents de cours d'appel et des procureurs généraux près lesdites cours, ou des présidents des tribunaux supérieurs d'appel et des procureurs de la République près lesdits tribunaux ; qu'il prévoit que, lorsqu'il estime que les faits en cause sont de nature à recevoir une qualification disciplinaire, le Médiateur transmet la réclamation " au garde des sceaux, ministre de la justice, aux fins de saisine du Conseil supérieur de la magistrature " ; que le garde des sceaux doit, dans tous les cas, demander une enquête aux services compétents ; que, s'il n'est pas tenu d'engager des poursuites disciplinaires, il doit, lorsqu'il ne le fait pas, en informer le Médiateur par une décision motivée ; que le Médiateur peut alors " établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel " ; qu'en reconnaissant au Médiateur l'ensemble de ces prérogatives, le législateur organique a méconnu tant le principe de la séparation des pouvoirs que celui de l'indépendance de l'autorité judiciaire ;

12. Considérant qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de déclarer contraire à la Constitution l'article 21 de la loi organique ;

13. Considérant, en revanche, que les autres dispositions de son chapitre II n'appellent pas de remarque de constitutionnalité ;

- SUR LE CHAPITRE III :

14. Considérant que le chapitre III, intitulé : " Dispositions diverses et transitoires ", comporte les articles 23 à 36 ;

15. Considérant que l'article 24 de la loi organique complète l'article 38-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisée, qui dispose que : " Nul ne peut exercer plus de sept années la fonction de procureur général près une même cour d'appel ", par un second alinéa ainsi rédigé : " A l'expiration de cette période, s'il n'a pas reçu une autre affectation, le procureur général est nommé de droit, dans les formes prévues à l'article 38, à un emploi hors hiérarchie du parquet de la Cour de cassation. Il en est de même dans le cas où il est déchargé de cette fonction avant l'expiration de cette période. Cette nomination est prononcée, le cas échéant, en surnombre de l'effectif organique de la Cour de cassation. Ce surnombre est résorbé à la première vacance utile dans cette juridiction " ; que l'article 34 rend applicables ces dispositions aux procureurs généraux nommés antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi organique ;

16. Considérant qu'aux termes du septième alinéa de l'article 65 de la Constitution : " La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du parquet donne son avis pour les nominations concernant les magistrats du parquet, à l'exception des emplois auxquels il est pourvu en Conseil des Ministres " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 28 novembre 1958 susvisée : " ... il est pourvu en conseil des ministres : - aux emplois de procureur général près la Cour de cassation, de procureur général près la Cour des comptes, de procureur général près une cour d'appel... " ; qu'en vertu de l'article 38 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, les décrets portant nomination aux emplois hors hiérarchie du parquet, parmi lesquels figurent ceux d'avocat général à la Cour de cassation, sont pris par le Président de la République après avis de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature ;

17. Considérant que l'article 24 de la loi organique prévoit que, dans certaines conditions, les procureurs généraux près des cours d'appel sont nommés " de droit " avocats généraux à la Cour de cassation ; que, toutefois, il serait procédé à ces nominations non par décret en Conseil des ministres, mais " dans les formes prévues à l'article 38 " de l'ordonnance du 22 décembre 1958, c'est-à-dire par décret simple du Président de la République ;

18. Considérant que le septième alinéa de l'article 65 de la Constitution impose, dans ces conditions, l'avis du Conseil supérieur de la magistrature ; que, si la loi organique examinée, en renvoyant à l'article 38 de l'ordonnance du 22 décembre 1958, prévoit bien un avis du Conseil supérieur de la magistrature, cet avis serait privé d'effet utile dès lors que la nomination serait de droit ;

19. Considérant qu'il s'ensuit que l'article 24 de la loi organique ainsi que son article 34, qui en est inséparable, sont contraires à la Constitution ;

20. Considérant que les autres dispositions du chapitre III de la loi organique n'appellent pas de remarque de constitutionnalité ;

21. Considérant qu'ont un caractère organique, par elles-mêmes ou du fait de leur inséparabilité de dispositions organiques, toutes les dispositions de la présente loi,

Décide :

Article premier.- Les articles 14, 21, 24 et 34 de la loi organique relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats sont déclarés contraires à la Constitution.

Article 2.- Les autres dispositions de la même loi ne sont pas contraires à la Constitution.

Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er mars 2007, où siégeaient : M. Pierre MAZEAUD, Président, MM. Jean-Claude COLLIARD et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Pierre JOXE et Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER, M. Pierre STEINMETZ et Mme Simone VEIL.

Publication Journal officiel du 6 mars 2007, p. 4230

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19/04/2011
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