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Thème 1 : L’enfant au centre du droit de la famille : une protection discutée

Thème 1 : L’enfant au centre du droit de la famille : une protection discutée

 

 

 

Le 20 novembre 2009 la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) adoptée par les Nations Unies consacrant la notion d’intérêt supérieur de l’enfant a fêté ses 20 ans, cette date d’anniversaire est l’occasion de faire un bilan de la situation de l’enfant dans notre droit. 

 

 

L’intérêt de l’enfant, une notion guide du droit de la famille

 

 

Selon le 1 de l’article 3 de la CIDE (V. infra CIDE, art. 3-1 in Pour aller plus loin) l’intérêt supérieur de l’enfant doit guider l’auteur de tout acte concernant un enfant. Du fait de leur généralité, les dispositions de cette convention ont trouvé à s’appliquer à l’ensemble des domaines du droit la famille. Après un long refus, la Cour de cassation a finalement reconnu en 2005 la CIDE d’application directe en droit interne(Cass, 18 mai et 8 novembre 2005), dès lors dans le cadre d’une question relative à un enfant le juge judiciaire est tenu de respecter le principe d’intérêt supérieur de l’enfant.

 

La Cour européenne des droits de l’Homme est venue préciser les modalités de prise en compte de l’intérêt de l’enfant, cette notion doit être « constamment interprétée de manière cohérente quelle que soit la convention internationale invoquée » (CEDH, 3e sect., 6 déc. 2007, n° 39388/05, Maumousseau et Washington c/ France).

LA CIDE fondée sur des intentions bienveillantes et légitimes en matière de protection de l’enfant a permis de réunir la quasi-totalité des États signataires autour de cet idéal commun. Néanmoins, au regard de ses principes généraux, la convention ne fournit pas de réponses aux nouveaux grands débats de société tels que l’accès aux origines et l’homoparentalité.

 

 

 

 

La prise en compte de la parole de l’enfant dans le procès

 

Dès la loi du 8 janvier 1993, le législateur s’est attaché à mettre en conformité le droit français à la CIDE en introduisant au Code civil le droit de l’enfant d’être entendu et représenté en justice de façon autonome.

 

Ce nouveau droit de l’enfant soulève de nombreuses interrogations quant à l’appréciation du discernement et de la crédibilité de la parole de l’enfant. Ces interrogations ont amené le législateur à préciser l’encadrement des conditions de l’audition de l’enfant en justice. À cet effet une loi du 5 mars 2007 consolidée par le décret du 20 mai 2009 est venue régir les auditions réalisées par le juge aux affaires familiales.

 

La loi du 5 mars 2007 impose au juge de s’assurer que le mineur a été informé de son droit à être entendu et d’être assisté par un avocat (C. civ., art. 388-1, al. 2). Il incombe aux titulaires de l’autorité parentale d’informer l’enfant de ses droits. Quand elle n’est pas à l’initiative du juge, seul l’enfant ou les parties à la procédure pourront être à l’initiative de l’audition. Le décret impose désormais en cas de refus que celui-ci soit motivé dans la décision au fond.

 

Lorsque l‘audition est effectuée par le juge, l’avocat est choisi par le mineur, il lui appartient de vérifier le discernement de l’enfant et de faciliter sa parole. Le compte rendu de l’audition doit être fait dans le respect de l’intérêt de l’enfant, ce qui permet aux magistrats de ne pas y faire figurer des éléments portant atteinte à son intérêt. Si l’intérêt de l’enfant le commande l’audition sera effectuée par une personne tiers désignée. Cette personne doit remplir certaines conditions et doit « exercer ou avoir exercé une activité dans le domaine social, psychologique ou médico-psychologique ». Désormais, les avocats ne pourront plus être les vecteurs de la parole de l’enfant devant le juge.

 

Ce rapide tour d’horizon des règles relatives à l’audition du mineur donne le sentiment d’une recherche progressive d’une association de l’enfant à un processus judiciaire dans lequel il conserve une place particulière faute d’être le plus souvent partie.

 

La conférence du conseil de l’Europe et de la commission européenne qui s’est tenue les 30 novembre et 1er décembre 2009 consacrée « aux enjeux dans les procédures d’adoption en Europe : garantir l’intérêt supérieur de l’enfant » confirme cette volonté. En effet une place essentielle est donnée à la parole de l’enfant, la convention propose que son consentement soit désormais nécessaire dès lors qu’il dispose d’un discernement suffisant, il appartient aux législations nationales des pays signataires de fixer l’âge à partir duquel son consentement doit être recherché.

 

 

L’accès aux origines : un droit inconciliable avec l’accouchement sous X ?

 

 

La loi du 16 janvier 2009 ratifiant l’ordonnance du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation, modifie l’article 325 du Code civil supprimant ainsi la fin de non recevoir de l’action en recherche de maternité. Cette fin de non recevoir avait été introduite dans le Code civil par la loi du 8 janvier 1993 pour donner à la mère accouchant sous X une protection supplémentaire.

 

L’action en recherche de maternité a pour but d’établir le lien de filiation avec sa mère biologique, or la suppression de fin de non recevoir ne résout pas en pratique la difficulté. En effet si la mère a demandé à bénéficier de l’anonymat de son accouchement, l’enfant ne pourra pas avoir accès à son identité et ne saura donc pas contre qui diriger son action.

 

La femme lors de son accouchement peut choisir plusieurs niveaux de protection de son identité, la loi du 22 janvier 2002 permet de dévoiler l’identité de la mère à son décès si celle-ci ne s’y était pas opposer de son vivant. À ce titre l’article L. 147-6 du Code de l’action sociale et des familles prévoit qu’en cas de décès de la mère le conseil national pour l’accès aux origines communique l’identité de la mère à l’enfant qui en a fait une demande.

 

 

 

 

Cette disposition avait pour vocation de faciliter à l’enfant l’accès à ses origines. On peut craindre que cet assouplissement des règles de protection de la mère pourrait au contraire la pousser à ne jamais communiquer son identité à l’enfant né dans l’anonymat.

 

Le débat a été relancé par deux arrêts, un arrêt de la Cour de cassation du 8 juillet 2009 et un jugement du TGI d’Angers du 8 octobre 2009. Dans ces deux affaires, suite à l’accouchement sous X de leur fille, des grands-parents ont demandé respectivement l’annulation de la procédure d’adoption et l’annulation du statut de pupille de l’État de l’enfant.

 

Ce qui posait problème dans ces décisions était l’établissement du lien de filiation entre l’enfant et les grands-parents, l’accouchement s’étant déroulé dans l’anonymat. Contrairement à la Cour de cassation, le TGI a donné raison aux grands-parents en considérant que le lien nécessaire avec l’enfant résultait de la « réalité biologique ».

 

Faisant suite à ces décisions, Mme Morano, ministre de la Famille, a déclaré que les dispositions relatives à l’accouchement sous X pourraient être assouplies, elle propose notamment d’encadrer l’anonymat de la mère en le limitant dans le temps jusqu’à la majorité de l’enfant.

 

 

Thème 2 : Le PACS : vers un élargissement des droits des partenaires ?

 

 

Quels droits pour les partenaires ?

 

 

En juin 2009, une proposition de loi (Ppl n° 461) visant à renforcer les droits des partenaires a été déposée au Sénat. Bien que cette proposition ait été rejetée, elle permet de nous interroger sur l’avenir des couples pacsés.

 

La commission des lois a rendu son rapport le 25 novembre 2009, il consacre le PACS en tant qu’une union juridiquement différente de celle du mariage. Le PACS ne crée aucun droit spécifique en matière de filiation, d’adoption, de délégation d’autorité parentale et de recours à la procréation médicalement assistée. Cette situation distincte se justifie par la souplesse du PACS, notamment pour sa grande liberté formelle, qui fait partie de ses attraits. Ce traitement différencié ne signifie par pour autant que le législateur se désintéresse des partenaires, la commission s’est d’ailleurs prononcée en faveur d’un système de réversion (pensions de retraite,…)  pour le partenaire survivant.

 

Cette disposition serait dans la lignée de la loi TEPA du 21 août 2007 qui avait supprimé tout droit de succession entre partenaires, les soumettant au régime des époux. Le législateur s’est également préoccupé de la situation des partenaires au niveau international en introduisant une nouvelle règle de conflit à l’article 515-7-1 du Code civil. Désormais le PACS enregistré est entièrement soumis aux dispositions matérielles de l’État de l’autorité qui a procédé à son enregistrement.

 

 

 

 

Une adoption envisagée pour les couples pacsés

 

 

Lors de la conférence du Conseil de l’Europe et de la Commission européenne consacrée aux « enjeux de la procédure en Europe : garantir l’intérêt supérieur de l’enfant », une convention européenne en matière d’adoption a été mise en place. Elle propose notamment l’élargissement de l’accès à l’adoption aux couples hétérosexuels non mariés mais liés par un partenariat enregistré. Elle laisse toutefois la liberté aux États d’étendre cette possibilité aux couples homosexuels vivant dans une relation stable. Le fait que la France n’ait ni signé ni ratifié cette convention s’explique par la méfiance vis-à-vis de cette disposition.

 

En droit interne, une proposition de loi a été déposée au Sénat le 16 décembre 2009 (Ppl n° 168), envisageant la modification de l’article 343 du Code civil qui prévoit l’adoption pour les couples mariés depuis plus de deux ans uniquement et de compléter celui-ci par « ou par deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité depuis plus deux ans ». Cette proposition étant plus libérale que celle prévue au sein de la Convention européenne en matière d’adoption a de ce fait peu de chance d’être adoptée. En effet, la convention proposait uniquement un élargissement de l’adoption aux partenaires hétérosexuels.

 

En droit positif français, l’adoption peut également être ouverte aux personnes célibataires. Dans le silence de la loi, l’orientation sexuelle n’est pas en principe un obstacle à l’agrément d’adoption. Un récent jugement du tribunal administratif de Besançon du 10 novembre 2009 (TA Besançon, ch. 1, 10 nov. 2009, n° 0900299 : JurisData n° 2009-013799) a annulé le refus d‘agrément du conseil général du Jura qu‘il jugeait insuffisamment motivé, les conditions d‘accueil offertes par deux femmes vivant en couple depuis 18 ans étant largement satisfaisantes. On peut noter que dans ce type de situation, la difficulté réside dans l’absence d’autorité parentale et de tout lien de filiation entre l’enfant adopté et le concubin homosexuel de l’adoptant.

 

 

Quelle autorité parentale pour le partenaire de l’adoptant ?

 

 

 

Une proposition de loi a été déposée au Sénat le 12 novembre 2009 (Ppl n° 96), qui envisage de modifier le premier alinéa de l’article 365 du Code civil. Ce texte instaure un régime particulier en cas d’adoption de l’enfant du conjoint : l’adoptant est en principe seul investi à l’égard de l’adopté de tous les droits d’autorité parentale. La proposition de loi suggère d’étendre la portée cette disposition au cas ou l’enfant serait adopté par le partenaire d’un PACS ou concubin du père ou de la mère de l’adopté. Dans cette hypothèse, l’adoptant aurait l’autorité parentale concurremment avec le conjoint, le concubin ou le partenaire parent de l’enfant, lequel en conserverait seul l’exercice sous réserve d’une déclaration conjointe (devant le greffier en chef du TGI).

 

Cette proposition permettrait de donner un cadre juridique à une réalité de fait. Elle serait de plus en conformité avec l’intérêt de l’enfant dans le cas ou le concubin ou le pacsé fait réellement office de parent.

 

Au vu du rapport rendu par la Commission des lois le 25 novembre 2009, le législateur ne semble pas se diriger vers cette ouverture, suivant ainsi la position de la Cour de cassation qui se refuse toujours à reconnaître cette situation.

 

 

 

 

La loi « de simplification et de clarification du droit» : refonte des procédures du droit de la famille

 

 

La loi du 12 mai 2009 dite loi de simplification du droit modifie profondément le contentieux familial et le droit des personnes. Deux dispositions essentielles sont à retenir :

  • la compétence du juge aux affaires familiales est étendue aux règles relatives au fonctionnement et à la dissolution des régimes matrimoniaux, des indivisions entre personnes liées par un pacte civil de solidarité ou entre concubins, ce qui tend à créer un droit commun du couple.
  • le nouvel article L. 213-3-1 du Code de l’organisation judiciaire transfère au juge aux affaires familiales les fonctions du juge des tutelles des mineurs.

 

Clémence Pierzo



29/06/2011
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